Introduction
2 heures. C'est la durée réelle du film et pourtant, théoriser une véritable durée mentale me semble désormais possible (voir nécessaire). Saut temporel, magie quantique, brèche accidentelle dans l'espace temps, on pourrait résumer ce film à une catastrophe naturelle et physique capable de produire des trous de vers gigantesques. Voilà la description minimale de mon ennui.
Et pourtant la réalisation était de taille. Des décors impressionnant (même pour aujourd'hui), des scènes rocambolesques pleines de sens, et un regard visionnaire sur notre société et ses aberrations. Mais alors qu'est-ce qui a coincé chez moi ? Pourquoi avoir ressenti autant de douleur physique face à une œuvre d'art travaillée et pleine de sens? En d'autres termes : pourquoi souffrir d'un bon film si celui -ci s'avère particulièrement sans défaut ?
Bon film ou bon « film » ou « film » ou … Quoi ? Qu'est-ce...
Et bien justement, c'est les termes eux-mêmes que je réviserais. Pour le « bon » je n'ai rien à redire. Le film critique un aspect non négligeable de la société de par le comique de ses scènes ridicules et fait réfléchir le spectateur au point de le rendre lui-même acteur de ce qu'il expérimente. On pourrait lui accorder un point positif de ce côté là. En vérité, rien que de l'avoir trouvé chiant, c'est sûrement rendre service à Tati quelque part.
Non, c'est le mot « film », qu'il faudrait revoir. Car oui, je n'ai pas vu de film. Comme je le disais, Playtime est un condensé délibéré de scènes situationnelles, ou le spectateur est censé rire face aux mêmes blagues tout du long. Et c'est tout.
Alors pour l'oppression omniprésente (ou omnipotente), on peut dire que l'effet est complètement réussi. J'étais dans un train, et je peux vous dire que rien qu'entendre des gens parler derrière mon dos était devenu un supplice pour mes oreilles tellement je voulais que la machine se taise.
Mais bon, bien que l'idée de base semble géniale, au final il s'agit plutôt d'un sketch d'anticipation unilatéral de 2h. Vous me voyez venir.. Il suffit simplement de rien trouver drôle pour s'ennuyer à mourir. Et hop, les 2h se transforment rapidement en 5... Puis 8.
Les scènes ont beau êtres intéressantes et riches en elle-même (on pourrait largement philosopher dessus), mais elles ne varient jamais et le scénario est totalement absent de l’intégralité du visionnage. Et je n'exagère rien, il n y a absolument pas d'intrigue car ce n'est pas le propos du film. Est-ce un mal ?
Je sais pas encore. Je dirais que c'est un choix très audacieux qui force notre concentration à apprécier les autres critères de la... Vidéo.
Donc qu'on l'adule ou qu'on remarque toutes ses qualités indiscutables, il me semble évident que Playtime n'est pas un film dans le sens ou il ne raconte pas d'histoire. C'est au mieux une succession de scènes contemplatives destiné à des étudiants cinéphiles qui doivent rendre une critique d'art à la fin de leur partiels. Je comprendrais alors tout bonnement pourquoi certains techniciens peuvent adorer cette expérimentation principalement visuelle. Pour ceux qui bossent dans le cinéma, ça doit forcément être du pain béni.
Personnellement, il me paraît impossible de contempler un film uniquement sur son plan technique. C'est la théorie de l'origine de ma souffrance.
Attentes subjectives
Mais je pourrait peut être déjà regretter ma phrase et sembler de mauvaise foi en disant cela. En effet, j'ai grandement apprécié Mad Max Fury Road ou encore Un Pigeon perché sur une branche philosophait sur l'existence, justement pour une caractéristique esthétique extravagante.
Oui, mais le style de Playtime me paraît beaucoup trop vide d'intérêt comparé à ceux-ci. Car ces films possédaient aussi un contenu émotionnel assez important en supplément de leur apparence gratuite. On peut me rétorquer alors que Playtime doit se voir comme un film volontairement asphyxiant, et donc qu'il a bien d'autres aspects. A cela je répond que c'est justement son asphyxie qui le réussi, mais que cela ne me procure aucun plaisir.
On peut encore faire mieux et me renvoyer à ma critique sur Au Poste. Et à cela je répond aisément que j'ai ris durant la séance de ce dernier, c'est pour ça...
Ensuite, ce n'est pas que je n'aime pas les films basés principalement sur une direction artistique bien au contraire, les films de Yuasa sont mes préférés pour ce point. Mais j'ai trouvé que cela n'a pas suffit à Playtime pour faire de lui un film, car bien qu'ayant quelque chose à raconter en sous-lecture, son propos se répète durant 2 trop grandes heures et ne varie à aucun moment.
En gros, le film n'apporte rien de plus que ce sur quoi il tend, c'est à dire nous torturer délibérément. Ce qui n'est pas le cas des films que j'ai cité précédemment comme vous pourrez le constater vous-même.
En bref, mes exigences de spectateur vont plus loin pour pouvoir supporter un film, et par extension pour pouvoir lui donner la nomination de « film ».
Conclusion
Dans la douleur psychologique et dans les tumultes du temps sacré, j'ai souffert.
Playtime est une expérience impressionnante qui a dévoré mon âme.