Au cinéma, ce fut une expérience globalement peu agréable. Au-delà de la dureté de certaines scènes, on se fait aussi pas mal chier, faute à une espèce de faux-rythme qui empêche toute montée en tension.


Cette longueur ressentie rend assez difficile l'entrée dans le film, d'autant plus que celui-ci est à peu près dépourvu de personnages, et ce alors qu'il emprunte beaucoup des codes du documentaire. Notre protagoniste Bella n'a ainsi pas de passé ou à peine, comme si le film se refusait à donner une explication psychologisante au fait de vouloir faire du porno ; mais il se refuse aussi à caractériser son personnage principal autre que par son amour du sexe et sa volonté de réussir.

Bella est ainsi l'avatar parfait du prono : suffisamment d'audace pour refuser de se plier aux normes de la société et suffisamment de docilité pour intégrer celles de la pornographie ; à la fois passionnée par le sexe, la performance, le porno, et découvrant tout de ce milieu (une explication alternative ou complémentaire étant que la candeur de Bella sert le scénario du film et son exploration du porno).


C'est tellement évident, et perturbant, qu'on peut faire l'hypothèse que c'est un parti-pris. Le némésis de Bella dans le film, Ava, semble avoir été conçue dans le même moule. Le milieu du porno est-il tellement déshumanisant qu'il faut être inhumain ou le devenir pour y réussir ?

Et ce qu'il y a peut-être de plus intéressant, c'est que malgré cette concordance total entre Bella et le porno, malgré même sa réussite, elle reste insatisfaite. Loin d'avoir pris le pouvoir sur le milieu, elle demeure in fine exploitée par ceux qui ont le pouvoir, c'est-à-dire les vieux gros moches.


C'est peut-être là le sens de la comparaison qu'a pu faire l'équipe marketing du film avec Showgirls. En effet, Pleasure n'a rien du côté camp de Showgirls, et les thèmes partagés par les deux films semble davantage lié à une même filiation à All About Eve.

Cependant, on trouve dans les deux oeuvres un travail sur le regard du spectateur, quoiqu'effectué de manière différente (et plus appuyée dans Pleasure). Ainsi, ce sont des films sur le commerce du sexe qui traitent ce sujet de manière très peu érotique ; des films sur l'exploitation plutôt que d'exploitation (un peu moins vrai pour Showgirls, Verhoeven oblige).

bébertnanos
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le 7 juin 2022

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