Mistral Gagnant
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Long-métrage d'animation de Mike Gabriel et Eric Goldberg (1995)
Sorti un an à peine après Le Roi Lion, Pocahontas : Une légende indienne a tout du film opportuniste conçu pour jouer sur la fibre commerciale d'une oeuvre qui replongea une société entière dans la course à la rentabilité : son histoire dépaysante couplée à sa mise en scène ultra-fluide, à ses thématiques d’accueil et de quête de soi, d'ouverture à l'autre et parfois même de volonté de domination y font souvent penser, la plupart du temps en moins bon.
Et si le style est grosso modo le même, sa rapidité d'exécution le rend fade : c'est comme si les réalisateurs, Mike Gabriel et Eric Goldberg, dans le soucis d'enchaîner un maximum de séquences reprises avaient passé leur film en accéléré afin d'y caser le maximum de références et de séquences mémorables, coupant toute intensité à de nombreux passages. La citation régulière de la contre-plongée où les lions, dominant, contemplent leur royaume rendra certes joliment avec la pacifiste Pocahontas, mais n'atteindra pas le quart de la saveur d'un Simba revenu, adulte, en ses terres de droit, sentant plus le réchauffé que l'hommage mignon.
Beaucoup trop récurrent, il est à l'image de ces scènes de chant, pourtant bien dosées dans Le Roi Lion, envoyées ici à l'excès : l'intrigue ne sert plus les chansons, ce sont les chansons qui bâtissent l'intrigue. Certaines, agréables et plus poétiques que d'accoutumée, auront beau relever la barre, restera tout du long ce goût amer de suivre une oeuvre seulement basée sur la copie dans le but de rapporter un maximum d'argent, la coupant instantanément de l'âme qu'elle aurait pu avoir.
Ce manichéisme constant n'est pas sans renvoyer le film aux plus bas instincts des dessins animés simplets pour enfants, qui n'auront pas encore compris, à l'époque, que faire un méchant à la psychologie réussie n'allait pas forcément le rendre plus appréciable (la révolution Shrek n'était malheureusement pas encore sortie) : l'envahisseur, représenté par un homme mauvais, gras, obèse et vulgaire, trouve son opposition dans le bel et preux John Smith, cliché américain à la chevelure comparable à celle de notre ami Charmand.
Les indiens sont eux-mêmes des stéréotypes de personnages gentils et braves, aimant quand on les aime, agressifs et violents quand on les attaque : ils ont tous les attributs des guerriers valeureux que l'on pouvait admirer enfant, et portent fièrement les attributs de leur culture, de leurs moeurs, de leur civilisation au nez de ces hommes armés qui sont jugés, par le film bien sûr, pour la plupart plus comme des animaux que des humains. Ce retournement des rôles, aussi intéressant est-il de base, ne sert que de développement à l'intrigue amoureuse entre Pocahontas et Smith, perdant ainsi de tout son sens.
Reste une animation des plus réussies, qui parce qu'elle est un poil trop rapide, écourtée par un montage sous cocaïne assène à l'oeuvre une intensité relative empêchant le spectateur de quitter l'écran des yeux (à part pour les scènes de chant, je vous le concède) : fluide et ambitieuse, elle présente de nombreux passages encore plus osés que la plupart des films des films de l'époque, apportant sa petite pierre à l'édifice des innovations techniques en matière d'animation.
C'est principalement sur ce point qu'il est à retenir comme l'un des incontournables de Disney, tant il témoigne d'une réussite esthétique absolue : ses décors, ses couleurs, ses personnages, sa mise en scène (si l'on omet les emprunts), tout est fait pour aller dans le sens du beau presque parfait, de l'agréable à voir, de ce dépaysement naturel et tapissé d'espèces de plantes et d'arbres qui aura fait rêver maintes générations, dont celle de celui qui vous écrit ces lignes.
Ainsi, et malgré ses trop fortes influences, Pocahontas n'en demeure pas moins une histoire réussie, agréable à suivre et propice aux rêveries de l'enfance, un poil prévisible peut-être, mais qui aura néanmoins le courage, après avoir aseptisé son histoire (la véritable vie du personnage n'était pas si rose à sa rencontre avec les envahisseurs), de ne pas affadir également sa fin, plus imprévisible celle-ci,
à des kilomètres des habituelles happy-ending de princesses Disney.
Ce voyage qui les aura fait se rencontrer ne pouvait décidément les réunir pour la vie.
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Une vie de cinéphile, Les meilleurs films avec Mel Gibson, Les meilleurs films de 1995 et 2020 : Et si la Troisième Guerre Mondiale était plutôt celle... de l'Amour?
Créée
le 19 févr. 2020
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