Point Break, c'est un peu comme vos gâteaux préférés, ceux quand vous étiez gamins. Ce sont les souvenirs de leur goût qui ne vous lassait jamais : celui du croquant des palets au chocolat noir et du fondant de la crème au chocolat blanc qui les séparait. C'était aussi vos petites habitudes de consommation, histoire de tirer un plaisir supplémentaire. Moi, par exemple, j'adorais essayer de séparer les palets, sans les casser, afin de me délecter ensuite de la crème au chocolat blanc. Hum ! Que c'était bon !
C'est aussi le souvenir de la déception quand, pour la troisième semaine consécutive, maman disait, en revenant des courses, qu'il n'y avait toujours pas les gâteaux en rayon. Puis le suicide de désespoir de Maurice le poisson rouge, quand vous avez appris qu'ils avaient arrêté la production. Mais une vingtaine d'années plus tard, une multinationale de l'agro alimentaire, qui a racheté la marque, décide de la réexploiter tout en misant sur la nostalgie du consommateur resté orphelin. Et de pousser à croire la nouvelle génération que c'est les meilleurs gâteaux du monde.
Sauf qu'une fois rentré des courses, le paquet sauvagement ouvert, déception. Ces sagouins ont remplacé la crème au chocolat blanc, ce qu'il y avait de meilleur après tout, par du gras de veau et un arôme de synthèse, le tout noyé de sucre qui rappe la langue. Enfoirés ! Fossoyeurs d'enfance !
Tout ça pour dire que ce nouveau Point Break, c'est exactement la même chose. Car on ressuscite un grand nom pour le vider de son sens, tout ça pour fourguer au chaland de la grande consommation formatée et sans goût.
Tout ce qui faisait le charme du film original a ainsi disparu. Si on a repris la trame générale de l'oeuvre de Bigelow, c'est pour la phagocyter du sol au plafond sous prétexte de mise au goût du jour pour le jeune sevré aux sports extrêmes et à Youtube. Si Utah et Bodhi sont bien là, leurs personnages respectifs se sont faits la malle. Keanu est ainsi remplacé par un balai à franges dont le charisme voisine celui d'une galette d'avoine soufflé Gerblé au goût de polystyrène. Bodhi, lui, bénéficie du charme d'Edgar Ramirez. Mais ce qui faisait qu'on s'attachait à lui malgré son statut de bad guy est complètement passé à la trappe.
C'est là qu'on touche à ce qui fait que ce Point Break new look n'est pas un bon film. Car s'il agite sous notre nez des marionnettes au nom connu, s'il reprend certaines scènes du film original pour les délocaliser, difficile de ne pas hurler et de se dire que le spirit des surfers est loin derrière nous, comme un vieux souvenir. Car Point Break a été actualisé afin de manger à tous les râteliers. En effet, maintenant, le film mélange avec confusion et une certaine légèreté coupable et inconséquente l'éco-warriorisme bas de plafond, l'ultra gauche militante, le new age dangereux et la légitimation constante de la violence dans un message dont il n'est pas interdit de penser qu'il est nauséabond, au point de transformer Bodhi en un gourou délirant et autiste antipathique.
Entre ce message, le véritable détournement d'un nom, le scénario d'un simplisme à pleurer et le fait qu'il n'y a presque plus aucune relation entre Utah et les personnages autres que Bodhi, il ne surnage donc plus que quelques belles images et le quota de séquences Xgames dont il ne manque plus que le sponsoring Red Bull qui donne des ailes. Et encore, si ces séquences sont belles, longues et spectaculaires, aucune espèce de tension ne s'en dégage, tant le sort de ceux qui les pratiquent nous est indifférent. Le spectateur attendra donc la prochaine scène de varappe ou de surf des neiges en soupirant, entre deux tunnels de dialogues. La 3D, elle, est plutôt bien utilisée, tout en magnifiant la beauté des décors et leur caractère impressionnant. Si le spectacle proposé n'est pas désagréable, il s'avère insuffisant, à mon sens, pour que le fan soit comblé. Quant à celui qui se déplace sur le simple nom de Point Break, il devra s'attendre, malheureusement, à ressortir de la salle en colère et avec des envies de meurtre, tellement ce remake tapine sous couvert d'un nom culte.
Dois-je enfin rajouter que Ray Winstone cachetonne et que la jolie Teresa Palmer ne fait que passer ?
Ce nouveau remâché estampillé 2016 s'avère donc bien loin de son modèle, tout en véhiculant un message à la fois putassier et simpliste afin de s'attirer la sympathie du jeune qui croit se nourrir (faussement) d'une contre culture qui n'est que factice et poudre aux yeux. Film formaté, impersonnel, sans quelque goût que ce soit, Point Break est la plus récente preuve qu'Hollywood n'a toujours pas compris que le recel de cadavre était puni par la loi.
Faudrait peut être dire à quelqu'un de fermer à clef la porte des cimetières.
Behind_the_Mask, sportswhore.