Laissant de côté l'univers personnel et un peu trop douillet de ses précédents essais, la comédienne / cinéaste Maïwenn prend un peu plus de risques en s'attaquant à un sujet extrêmement délicat, collant aux basques de la BPM, se réservant le rôle d'observatrice, de lien entre le spectateur et le monde qu'elle décrit.
Aidée par Emmanuelle Bercot au scénario et s'inspirant de plusieurs reportages sur le sujet, la cinéaste tente de coller au plus près du quotidien de ses protagonistes, de capter l'essence même d'une profession difficile et peu reconnue, d'observer les conséquences d'affaires souvent sordides sur la psyché humaine. Ne connaissant absolument pas le milieu dont il est question ici, je ne m'aventurerais pas sur le terrain du "réalisme" mais il faut reconnaître que la description semble juste et ne cherche jamais à tomber dans le sensationnalisme ou le misérabilisme, alternant parfaitement les passages éprouvants et les instants plus légers.
C'est d'ailleurs une des grandes forces du film, ne jamais sombrer dans le pesant, dans le glauque, "Polisse" parvenant à montrer toute l'horreur de certains cas tout en conservant une légèreté salvatrice, que ce soit à travers des dialogues ciselés, une poignée de séquences récréatives (la boîte de nuit; l'exercice de tir...) ou des situations tellement grotesques et surréalistes (le coup du téléphone portable), que les protagonistes (et le spectateur) préfèrent en rire sans que cela ne diminuent en rien l'implication de chacun.
L'autre force du film est évidemment son casting quatre étoiles, rempli à la gueule de personnages attachants et tous joués avec un naturel confondant par des comédiens impliqués et visiblement ravis de faire partie de l'aventure. S'ils sont tous impeccables, on retiendra surtout Marina Foïs, constamment sur la brèche, et JoeyStarr, incroyablement touchant et faisant preuve d'une présence et d'un charisme incroyable, bouffant à lui seul la pellicule. On regrettera alors que Maïwenn abandonne peu à peu son rôle de témoin pour tirer un peu trop la couverture à elle, donnant beaucoup trop d'importance à son personnage et à une histoire d'amour totalement hors sujet.
Cherchant avant tout le réalisme plutôt que le spectaculaire (le film pourra sembler non-cinématographique à certains), "Polisse", oeuvre collective récompensée un peu partout, est une réussite exemplaire et nécessaire, poignante et captivante, parfois dure pour les nerfs et s'achevant sur un final doux-amer où il apparaît évident que l'enfant est bien plus fort que l'adulte, plus apte à encaisser les coups et à se reconstruire.