En revoyant Poltergeist après plusieurs années, démarche motivée notamment par une liste faisant inventaire de quelques souvenirs filmiques ayant marqués mon enfance, je me retrouve scindé en deux téléspectateurs distincts : l'ancien enfant traumatisé, et l'adulte débile.

L'ancien enfant traumatisé que je suis se souvient encore de Carole-Anne, ce lutin albinos flippant, parlant à sa télé et se faisant enlever par des fantômes planqués dans son placard. La gamine (paix à son âme d'ailleurs) avait quelque chose d'inquiétant de par son apparence de poupée stoïque face des manifestations aussi terrifiantes, et sa façon de parler aux limites de la cassette audio débitant son enregistrement au ralenti que j'appris plus tard à incomber à un doublage de compétition (terme péjoratif).

L'ancien enfant traumatisé s'est demandé, en revoyant Poltergeist, comment il a bien pu oublier ces scènes avec les enfants dans la chambre, tellement représentatives des frayeurs nocturnes et des délires parano surnaturels qu'un gosse peut se taper dans son lit une fois la lumière éteinte. Je parle bien sûr de CE PUTAIN DE CLOWN sur la chaise à bascule que Robbie essaie de recouvrir, les yeux fermés et à reculons, de son blouson afin de ne plus avoir à SUPPORTER SON FACIES DE PUTAIN DE CLOWN QUI FAIT FAIRE PIPI DANS LA CULOTTE. J'en ai encore eu des frissons, vingt après le premier visionnage, bordel !

Je parle aussi de l'épisode de l'orage, sorte de climax de toutes les peurs et appréhensions qu'induisent les bruits et les mouvements d'une maison qui dort dans un esprit aussi impressionnable que celui d'un gamin de 7 ans.

L'ancien enfant traumatisé que je suis a vu revenir toutes les impressions de tension flottante qui joue avec les nerfs en pelote de celui qui veille un peu trop tard et qui a vu des choses marquantes, comme celle qui plane lors de la scène du chasseur de fantômes dans la cuisine, puis devant le miroir.

L'ancien enfant traumatisé que je suis fut aussi de nouveau saisi par l'aura presque surnaturelle de Zelda Rubinstein, qui joue une medium de petite taille mais de grande étrangeté.

Et cette fin presque apocalyptique, impressionnante, ou l'épouvante cède la place à l'horreur ET QUI A BIEN FAIT MARRER L'ADULTE DÉBILE QUE JE SUIS DEVENU !!!

Alors bon, l'adulte débile que je suis n'a pas pu s'empêcher de remarquer pas mal de connerie dans ce film.

Spielberg, quasi omnipotent, qui place des produits de son pote Lucas de partout du début jusqu'à la fin. Spielberg, toujours quasi omnipotent qui rend le réalisateur de Massacre à la tronçonneuse quasi impotent en distillant guimauve, morale anti blasphématoire et valeurs familiales dans un script pourtant très prometteur. Et Spielberg toujours, qui fait du gamin de l'histoire le seul qui a les cojones de dégommer directement un mannequin de clown sadique possédé quand tout le monde joue à cache-cache pour retrouver une merdeuse kidnappée par des esprits férus de chaines câblées.

Parlons en d'ailleurs de la gamine (paix à son âme). En la revoyant dans sa grenouillère de gros bébé cadum péroxydé de merde je n'ai eu qu'une envie : lui mettre un shoot. Et quand elle ouvre sa bouche c'est uniquement pour baver deux ou trois lignes de dialogue insipide avec la voix INSUPPORTABLE de Brigitte Lecordier.
J'en suis venu à bénir Spielberg, quasi omnipotent vous l'ai-je dit, de l'avoir fait disparaitre une bonne partie du métrage, sûrement faute d'avoir une sœur jumelle à faire jouer pour contourner la loi sur le travail des enfants.

Un détail qui a son importance, j'ai revu le film en VF. Et si certains crieront au scandale moi je remercie le ciel, où peut être se trouve aussi Spielberg (quasi omnipotent), de m'avoir permis de remarquer deux choses :

-Que la technologie et les progrès du doublage ne permettaient pas encore en 1982 de doubler les voix des émissions de télé dans les films, puisque tout le monde parle français sauf ces connards des médias américains chauvinistes qui refusent de se faire comprendre de leurs royalistes de téléspectateurs.

-Que comment est ce que j'ai pu vivre ma misérable vie de merde sans avoir en tête les jours de grisaille ou de blues la ligne de dialogue suivante :

(le contexte : c'est presque la fin, tout le monde est dans la chambre qui ressemble à une piste de danse disco ; c'est le bordel y a du vent et du bruit. La medium dit au papa de lui filer la corde afin qu'elle puisse passer par le placard chercher Carole-Anne dans l'au-delà (j'invente pas), mais la mère veut aller chercher sa fille elle-même ; voyez la fermeté, la grande expérience et le professionnalisme dont notre clair voyante fait alors preuve)

La mère : Mais qu'est ce que vous faite ?? (question con, au demeurant)
La voyante : Il faut que j'aille chercher votre fille !!
La mère : Elle ne viendra pas avec vous, laissez moi y aller !
La medium : Je ne peux pas ! Vous n'avez jamais vu ça !!
La mère : Vous non plus !
La medium : ... ... ... (long silence) Vous avez raison, d'accord.

J'en ai ris jusqu'à l'incontinence, spontanément, essayez ça fait du bien.

Bref, l'adulte débile que je suis, consterné par tant d'incohérence, de longueur et d'effets tombant souvent à plat par une sinueuse démarche d'arrondissement des angles et du propos due à un screenwriter frileux pensait avoir tout vu.
Mais au sortir d'une demi déception et de la destruction d'un mythe (j'entends par là celui de l'ancien enfant traumatisé), imaginez ma tronche face à un FINAL DE TRAIN FANTÔME.

Au fait, je suis peut être débile mais quand un mari explique à des parapsychologues qu'il connait depuis deux minutes que sa fille aînée a 16 ans et que sa femme en a 32, ça sous entend qu'il l'ait engrossée alors qu'elle n'avait que 15 ans.

Tu m'étonne qu'il n'ait pas l'esprit tranquille (jeu de mots).


[EDIT 12.07.12: La MGM préparerait actuellement un remake co-produit par Sam Raimi. (source Geek magazine S04E02) Pour le pire ou pour le meilleur?]
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