Poltergeist II
5.2
Poltergeist II

Film de Brian Gibson (1986)

Poltergeist II : The Other Side, Brian Gibson, U.S.A, 1984, 1 h 31

Comment passer après une œuvre aussi unique et forte que « Poltergeist » ?
Et bien, Brian Gibson nous apporte la réponse, simple et sans appel : ça ne passe pas.


Cinéaste discret, à la filmographie éclectique, le Britannique Brian Gibson s’est surtout fait connaître au début des années 1980 pour sa collaboration avec les groupes Styx et Foreigner. Première production d’envergure dont il est en charge, l’unique film d’Horreur de sa carrière consiste en une commande de studio des plus banales. Elle n’a pas d’autres objectifs que de capitaliser du cash sur le succès du premier opus, quatre ans plus tôt…


Pourtant de l’ambition Brian Gibson en avait, puisque la première copie qu’il rendit du film ne durait pas moins de 2 h 10, quand la version ciné est amputée de 40 minutes. La frilosité de producteurs peu confiants en un cinéaste peu réputé, abouti à une production assez fade, confuse, qui ambitionne d’expliciter la présence des esprits du premier, mais il en résulte un gâchis vraiment dommage. Vu sous cet angle, l’intérêt se révèle très limité. En voulant éclaircir le mystère, il fait perdre tout le suc de l’expérience « Poltergeist », en proposant un gros bordel qui part dans tous les sens et peine à faire corps avec un certain propos.


La famille Freeling est de retour (à l’exception de Donna, dont l’interprète Dominique Dunne fut assassinée juste après la sortie du premier film en 1982), dans une nouvelle maison, qui n’est pas construite sur un ancien cimetière. Pourtant les esprits reviennent harceler la pauvre Carol-Anne, sur un postulat qui aurait pu se montrer intéressant s’il avait pris le temps d’être plus clair. Comprendre ici qu’un directeur's cut pourrait certainement le rendre plus passionnant. Car le principe même des esprits de retours d’outre-tombe, invalide totalement toute la dernière demi-heure du métrage de Tobe Hooper.


Dans la forme, le film conserve une imagerie proche de celle présente dans le précédent, sans la présence de Spielberg devant ou derrière la caméra. En revanche, dans le fond tout change, puisqu’il n’y a pas le savoir-faire horrifique d’un Tobe Hooper, ni de vision d’ensemble bien tranchée. La métaphore culturellement puissante du premier, sur l’émancipation de Diana dans une société patriarcale dégoulinante d’une idéologie dépassée, disparaît complètement. Le personnage en devient d’ailleurs des plus secondaires.


C’est Steve, le père, qui devient ici le héros, dont le rôle s’avère de maintenir sa famille unie, en bon chef de la Famille américaine qu’il est. Ce retournement, particulièrement brutal, fait entrer le film dans les carcans de la bonne société conventionnée de l’ère Reagan. Même le « méchant » ne possède aucune ampleur, Kane, un pasteur ayant fricoté avec les forces du mal, aurait pu servir à mettre en lumière la radicalisation chrétienne de la société, impulsée par Reagan et ses proches. Que nenni.


« Poltergeist II : The Other Side » ne parvient jamais à se démarquer d’aucune sorte. Totalement charcuté, ce qui est présenté à l’écran est le résultat de la stupidité de producteurs, trop contents de reprendre la main sur l’aspect artistique. Avec les 80's, ils se mirent à massacrer tout un pan du savoir-faire hollywoodien hérité des seventies, et en particulier dans l’horreur issue des grands studios. Le film de Brian Gibson est ainsi un film de la MGM et a peu à voir avec l’auteur crédité derrière la caméra, surtout au vu des productions qu’il emballera par la suite.


D’une banalité effrayante, le métrage se contente d’enchaîner des poncifs téléphonés. Même si certaines séquence demeurent convaincantes, avec un gore fun plutôt bien venu, c’est trop peu et très mal exploité, à l’image d’une dernière séquence qui laisse entrevoir une ambition sans bornes. Elle est expédiée en moins de cinq minutes, emballer c’est pesé, merci au revoir. Le film rate sans cesse le coche, à l’instar de la sous-utilisation des artwork de H.R Giger, à peine montrés à l’écran. Engager Giger et couper son travail au montage, voilà la mentalité d’un Hollywood devenu bien moribond.


Tout n’est pas à jeter, certes, mais la frustration omniprésente empêche cette suite de tenir la mesure avec le premier film. Pourtant sur le papier, la nouvelle direction était alléchante, en contre-pied, par une atmosphère plus orientée vers le fantastique, comme en témoigne le score de Jerry Goldsmith, très différent du premier, qui instaure une ambiance bien particulière. Plus onirique en un sens, elle se démarque de l’aspect épouvante de l’original. Mais seule la déception demeure lorsque le film se termine, avec un goût d’inachevé, peu rassurant sur l’intérêt d’une trilogie en devenir, dont le trois viendra éclairer l’agonie. Des fois, il faut savoir s’arrêter, dès le premier…


-Stork._

Peeping_Stork
6
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le 10 sept. 2021

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Peeping Stork

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