Ponyo sur la falaise par SimonHours
Miyazaki fait avec Ponyo une relecture de la Petite Sirène d'Andersen, qu'il transpose dans une petite ville côtière du Japon contemporain. Sôsuke, un petit garçon débrouillard de 5 ou 6 ans, fils d'un marin absent et d'une femme de caractère (figure chère à Miyazaki), rencontre une fillette poisson dont il s'éprend et qu'il surnomme Ponyo. Celle-ci, dotée de pouvoir magiques, tombe vite amoureuse de lui, au point de braver les interdits de son père, un magicien des fonds marins, pour se transformer en petite fille et partir découvrir le monde de Sôsuke.
Mon appréhension était forte au début : tout le battage marketing à la Disney qui avait entouré le film lors de sa sortie au Japon, et la relative déception du Chateau Ambulant, m'avaient fait craindre que Miyazaki ne fût tombé dans la facilité avec ce nouveau film. C'est pourquoi j'ai eu du mal à rentrer dans le film : au lieu de l'apprécier tout simplement, j'étais surpris et soulagé à chaque scène de le voir ne pas tomber dans les facilités qui s'esquissaient, et que j'étais prêt à encaisser avec résignation. Le dessin plus naïf, la ligne plus claire, les formes plus simples que dans Mononoke, Chihiro ou Porco Rosso, me parurent d'abord suspects. Jusqu'à ce que je comprenne qu'il collaient parfaitement au ton léger du film, et qu'il figurait un retour en enfance du style même de Miyazaki. Peu à peu je réalisai, sans oser y croire vraiment, ce qui se passait: j'étais devant un nouveau Totoro, carrément.
Si l'on retrouve sur le fond les grand thèmes cher à Miyazaki (l'écologie, l'amour, la famille...), le grand maître japonais revient, avec Ponyo, à un cinéma dans sa forme plus enfantin, plus naïf, plus gentil, et dépourvu du souffle épique qui habite la plupart de ses autres films. Ou le détournant: la meilleure scène du film est une chevauchée aquatique magnifique, sur un thème musical de Joe Hisaishi, hommage malicieux à Wagner. Point de terrifiantes walkyries ici pourtant: la « Chevauché de Ponyo » est emportée et alerte, mais souriante et bariolée, à l'image du film. A voir la petite fille courir sur les vagues, à la poursuite de son amour, on ne peut que sourire béatement. La Nature déchaînée inquiète, mais ne mène jamais à la catastrophe. Le monde d'après le déluge, loin d'être le lieu d'un pessimisme apocalyptique, et celui de la solidarité, de la bonne humeur et d'un vivre ensemble rayonnant. Cette vision de société idéale, qui est en fait la nostalgie d'un Japon populaire chaleureux commune à tous les films de Miyazaki, se marie subtilement bien avec les références piochées dans la culture occidentale; le meilleur exemple est la de la mère de Ponyo, mélange de divinité grecque, de princesse viking et de yôkai (être surnaturel du folklore japonais).
Cette mère, inquiétante par son absence durant tout le début du film, apparaît finalement bienveillante et encourage la première l'enfance d'un amour qui se crée entre Sôsuke et Ponyo, un amour évident et joyeux.