Popcorn
5.8
Popcorn

Film de Mark Herrier (1991)

Ce billet critique va être pour moi l'occasion de rendre un hommage à un film et à un réalisateur qui s'est servi d'un film comme Popcorn afin d'en améliorer l'espèce de jubilation horrifico-comique, cette jubilation de l'esprit consiste à s'amuser avec les choses horribles. Mais à s'amuser jusqu'aux confins de la folie, une sorte d'hilarité/ sardonisme perverse qui fait naître le grotesque. Popcorn est comme qui dirait le petit frère de Scream, et cela n'a rien d'humiliant pour ce premier de le dire. En effet, plusieurs points communs ou plutôt de filiation sont à recenser comme le jeu de distance, l'humour omniprésent, la volonté du surjeu et des scénarios capillotractés. Recensant depuis plus de deux ans les films faisant usage à quelques titres que ce soit de la distanciation sur une liste dédiée, distanciation que je définis comme étant un phénomène manifeste où le spectateur a conscience que les acteurs sont aussi conscients des rôles qu'on leur a attribués (ainsi que tous les divers degrés qui cheminent vers cette conscience qui se regarde), je ne listerai pas Popcorn dans cette liste mais... Force est de constater la part prépondérante de l'hommage au cinéma d'horreur-fantastique et de science-fiction dans ce dernier.


Et pour cause, c'est une véritable armada d'hommages, une matriochka d'hommages. Hommage aux films via des extraits, hommage aux spectateurs, aux festivals, hommage aux acteurs au travers leur composition pour le moins simpliste, avec toutefois un personnage central qui cache un lointain et trouble passé, hommage aux personnages secondaires qui croient aider l'héroïne mais qui sont cons comme des manches à balai, gentils hein mais cons, souvent jeunes d'ailleurs (l'horreur ne s'attaque jamais aux vieux et aux vielles, que des adolescents ou des familles petites-bourgeoises) et enfin hommage au grand méchant loup, au monstre issu de l'inconscient collectif, fomenté par la lâcheté d'une communauté toute entière (bon, généralement, le méchant a un terrain prédisposé à une trouble psychiatrique mais là, après des décennies, il peut enfin décompenser son mal-être au travers d'un plan diabolique, pas toujours finaud-finaud, mais terriblement diabolique). Tous ces hommages mis bout à bout pourraient faire un documentaire à lui seul si cela ne générait pas, par collusion, par des mises en situations. Popcorn est belle et bien une fiction, mais en plus elle est complètement agréable à visionner - ce qui m'a donné envie de partager ce billet avec toi, de partager cet autre cri.


Cependant, le film n'est pas aussi distanciant : il reste dans le film et les comédiens ne montrent aucun signe qu'ils prennent conscience qu'ils sont aussi des comédiens au-delà de leur rôle. Du coup, c'est une grande différence avec les Screams 1,2,3 et 4 quelle que soit leur qualité. Dans Scream, on retrouve un méchant humanisé qui veut faire comme dans les grands films d'horreur. Dans Scream, on ne voit que des coulisses tragiques d'un tournage ou d'une pièce qui se passe bien. Dans Scream, on joue aussi avec les codes, plus cette habileté de ton qui consiste à prendre pour scénaristique des détails ou des répliques que n'importe quel fan aurait pu dire. La distanciation n'est pas complète dans Scream, et pour cause, il faut toujours un minimum de crédibilité et d'immersion. Et c'est là que Scream est à la fois un fabuleux hommage mais aussi quelque chose de très intelligent. Bref, c'est avec Popcorn, que je considère comme déjà bon, que je me rends compte que Scream était un film-charnière de l'histoire de l'horreur cliché mais que Craven est un grand monsieur qui sait jouer avec les registres shakespeariens.


L'horreur est une grande famille. Elle génère des liens comme rarement les autres familles du cinéma le font et Popcorn investit pleinement ce champ, avec beaucoup de fun sans tomber dans la terreur ou dans la comédie. C'est du cinéma popcorn mais une telle ode au popcorn que c'en devient riche. C'est dommage qu'il ne soit pas davantage connu. En tous cas, je m'y serai employé et si j'apprenais que je l'ai fait découvrir à quelqu'un d'autre, que j'ai passé le flambeau, j'aurai fait mon boulot.

Andy-Capet
6
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le 14 sept. 2016

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Andy Capet

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