Voyage léger et coloré dans les styles et les mœurs de la France des années 50, "Populaire" de Régis Roinsard insère les conventions de la comédie romantique dans le contexte d'un sport méconnu et révolu : la dactylographie de compétition. Bien que la soudure de deux genres produise un amalgame plutôt étrange - imaginez un véhicule Doris Day-Rock Hudson imprégné de l'esprit de "Rocky" - l'exécution habile de Roinsard et de sa distribution attrayante fait du film un divertissement solide, génialement rétro.
Le film n'annonce pas immédiatement son thème sportif. Au début du film, Rose Pamphyle (Déborah François), une provinciale impatiente des choix limités de la petite ville normande, se rend à Lisieux et postule pour un emploi de secrétaire auprès du directeur d'une compagnie d'assurance, Louis Echard (Romain Duris), qui est sceptique jusqu'à ce qu'elle démontre impétueusement ses compétences autodidactes mais impressionnantes en dactylographie.
Non seulement elle obtient le poste, mais Louis lui demande d'emménager avec lui. Elle explose à cette idée, mais se méprend : il ne veut pas d'elle comme maîtresse. Il veut veiller à l'épanouissement de ses dons manuels. En peu de temps, il se transforme en coach et commence à la sevrer de sa méthode frénétique à deux doigts.
En peu de temps, leur travail de bureau est rarement mentionné, car Louis et Rose commencent ensemble à orienter ses compétences plus affinées vers l'arène des concours de dactylographie. (Apparemment, ces compétitions étaient assez populaires il y a quelques décennies, même si elles n'ont pas laissé beaucoup d'impression sur la culture populaire. Peut-être connaîtront-ils un renouveau, maintenant que les machines à écrire connaissent un certain retour à la mode).
Une fois que la trajectoire narrative devient claire, le spectateur peut se demander : Un film peut-il vraiment soutenir l'intérêt par une simple succession de compétitions dans lesquelles une ribambelle de jeunes femmes nerveuses et élégamment vêtues (il n'y avait pas d'hommes dans ce sport, apparemment) s'acharnent sur des machines à écrire, essayant d'établir le record du nombre de frappes ? La réponse, heureusement pour "Populaire" (le titre fait référence à un modèle de machine à écrire), est en grande partie oui.
Même si le spectateur aurait pu se contenter d'un ou deux tours de moins, l'ascension des compétitions locales, régionales, nationales (à Paris) et mondiales (à New York) est passionnante, parfois même haletante, grâce à la mise en scène exubérante de Roinsard, qui en est à sa première réalisation, et aux contributions techniques expertes de collaborateurs de choix, dont Guillaume Schiffman, directeur de la photographie de "The Artist", Sylvie Olivé, conceptrice de la production, et Laure Gardette et Sophie Reine, monteuses.
Ensemble, ces artistes évoquent une vision des années 50 aussi riche en couleurs et en compositions classiques que les films à succès de l'époque. En fait, ils semblent plus redevables à divers repères hollywoodiens vintage, de "Elle et Lui" à "Comme un Torrent", qu'aux films français de la même époque. "Populaire" aurait été l'une des productions françaises les plus coûteuses de ces dernières années, mais inutile de s'en excuser : tout cet argent se retrouve à l'écran, offrant un élan visuel ludique et complice qui est l'un des principaux plaisirs du film.
Un autre facteur qui empêche l'intérêt des concurrents de faiblir est la présence et la performance gagnantes de la nouvelle venue Déborah François. Avec sa blondeur à mi-chemin entre Sandra Dee et la jeune Catherine Deneuve, et sa prestance générale manifestement inspirée d'Audrey Hepburn, la Rose de François semble non seulement incarner l'époque, mais elle est aussi un modèle convaincant de cran et de détermination athlétiques.
Si le Louis de Romain Duris, souvent aigrelet, est moins attachant, c'est davantage dû à la conception du personnage qu'à la performance de l'acteur. Rose s'éprend de lui bien avant qu'il ne lui rende la pareille, ce qui le laisse étrangement renfermé et récessif. Est-ce parce qu'il est devenu obsédé par l'idée d'être le coach de la fille au détriment de tout le reste, ou est-ce qu'il cache un secret problématique qui le rend phobique de l'engagement ? En fait, il s'agit plutôt de ce dernier, un secret qui implique ses meilleurs amis, un Américain (Shaun Benson) marié à une Française (Bérénice Bejo) que Louis connaît depuis son enfance.
Cependant, il s'agit simplement d'un de ces artifices conçus dans un seul but : retarder la grande percée romantique aussi longtemps que possible, jusqu'au moment où Rose se retrouve dans un auditorium new-yorkais plein à craquer face à une Américaine muette qui a déjà remporté deux fois le championnat du monde, sous les yeux des fanatiques de dactylo du monde entier. En fin de compte, cependant, les faiblesses de la narration dans le domaine de la romance ne nuisent pas à l'émotion de la finale, qui offre les résultats escomptés aux amateurs de comédies romantiques et de films sportifs improbables.