Au gré du vent

Que dire de ce film... Une œuvre surprenante, à l'image du cinéma humble et sensible de Hou Hsiao Hsien.

Poussières dans le vent, c'est l'histoire d'un garçon et d'une fille, Wan et Huen, dans un petit village de Taïwan, campagne lointaine où la culture des patates et le travail à la mine semblent être les seuls chemins tracés par les adultes. Ces deux enfants, arrivés à l'âge adulte, décident de partir pour la capitale pour y trouver du travail et grandir loin de l'impasse familiale.

Un récit simple, sans tumulte, pour deux âmes liées par une amitié muette, où chaque regard lancé à l'autre laisse entrevoir un amour timide et protecteur, mais également un regard las et apeuré. Car ce garçon et cette fille se perdent, dans une ville trop grande pour eux, pour un travail qu'ils n'imaginaient pas aussi insipide - elle chez une couturière, lui dans une imprimerie. Leur avenir s'échappe, et c'est à reculons qu'ils se meuvent : tous deux se sentent coupables d'avoir abandonné leur famille, et envoient chaque mois de l'argent à la campagne. Ils y retourneront souvent, et ces longs travellings silencieux sur les rails (comme les fait si bien HHH) ponctuent le récit de nombreux aller-retours, ceux de la vie incertaine, discontinue de ces deux enfants paumés, déchirés entre ville et campagne. Des mois passent, peut-être quelques années, et Wan sera bientôt convoqué pour son service militaire. Loin de son amie, de son amour d'enfant qui le rattachait encore à une lueur d'espoir, épuisé par un avenir à peine entamé et déjà brisé, il sombrera de désespoir à la lettre lui annonçant le (triste) mariage de Huen dans son village natal.

HHH réalise ici un film sublime et réservé, où les fragiles mélodies à la guitare ponctuent chaque paysage avec une sensibilité renversante, et où chacun de ces arpèges, chaque fois comme interrompu, nous renvoie à cette jeunesse pleine d'espérance mais bien trop chétive pour s'épanouir dans un avenir bienheureux.

Wan et Huen. Poussières dans le vent.