L’empathie que suscite le film est sincère, car ses personnages le sont aussi, dans leurs erreurs, leurs partis pris et leur parcours. C’est cette sincérité qui fait d’ailleurs l’âme du film et qui le rend efficace malgré ses énormes partis pris, qui sont parfois un peu gros à avaler (sans jeux de mots salaces). Bobby seul contre tous n’est pas un film sur Bobby, mais sur ses parents. Le film cerne avec une belle acuité le point de vue maternel (Sigourney Weaver s’y implique sans borne) et répond à chacune de ses interrogations, de façon méthodique et sans éluder les points saillants. Car ce film porte davantage sur l’incompréhension du milieu homosexuel, et sa diabolisation en contre-mesure de sa supposée débauche. D’un point de vue surtout religieux, mais également dans le quotidien. Aussi, la proximité avec la famille de Bobby (malgré leurs réactions, ils ne sont pas haïssables, et sont plus nuancés que les clichés qu’on pouvait attendre, à commencer par le père, plutôt léger et pudique sur le sujet), Bobby lui-même (qui subit les agressions de son quotidien après la révélation en tentant toujours de se faire accepter par sa mère (figure de proue de l’opposition, elle prend l’essentiel des initiatives pour raisonner Bobby)) ainsi que plusieurs intervenants extérieurs, qui apportent un point de vue davantage objectif et distancé. Malheureusement, le film a également ses limites. Le destin de Bobby était nécessaire pour créer le choc et susciter la réaction et les tiraillements très catholiques pour poursuivre le récit et délivrer son message. Néanmoins, la vision extrêmement brutale du coming out (les doutes n’en sont pas vraiment un, la première relation l’est) ne cadre pas vraiment avec cette carrure de petit catholique soucieux de faire la paix avec sa famille et ses goûts, et se révèle assez stérile question consensus (elle braque les individus dans leur position). De même, la conclusion, après un discours particulièrement émouvant de Sigourney Weaver… enchaîne sur une gay pride montrant une mère au foyer catholique gambader avec euphorie dans l’assistance, au milieu des drag queen et des cuirs-moustaches. C’est mignon, gentil, mais bon, elle a l’air d’avoir perdu toutes ses inhibitions, la mère au foyer ! La compréhension n’implique pas une acceptation sans borne, pas à ce point en tout cas (car si accepter l’homosexualité est une chose, les variantes de la libération des mœurs en mode provoc, c’en est une autre). Enfin, la mise en scène de Bobby est parfois agaçante dans ses effets visuels un peu kitschs, qui l’isolent du groupe (ce plan de dos où il remonte le courant des élèves, pfff) ou qui expriment son ressenti sous forme de digressions oniriques clippesques où il déambule dans des décors, tout seul. Malgré les gros sabots minoritaires que prend le film pour clore sa marche (c’est presque aussi drôle que les villages people de Summer Storm), les gentilles intentions sont sincères et on n’est pas surpris de lui trouver des bons points. Malgré une utilité limitée (le film est à destination d’un public lambda hétéro pour qui l’homosexualité est un vague problème génétique qui arrive aux autres, n’importe qui ayant un peu discuté avec des homos ou s’étant interrogé sur le sujet aura déjà assimilé les « leçons »), le drame se suit très bien, et les prestations de ses acteurs sont plutôt convaincantes.
Voracinéphile
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le 26 juil. 2014

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