Première Année est un film anxiogène. Pour avoir passé des concours à Villepinte dans des conditions de réussite identiques voire encore plus drastiques que celles de la première année de médecine, j'ai retrouvé, avec un arrière goût assez désagréable, les sensations que l'on ressent dans ces grandes halles déshumanisées.
Très bien vendu, Première Année semble assez vain de prime abord. Certes, cette première année de médecine est bien présentée, avec un côté presque docu-fiction qui fonctionne bien, mais on pourrait finir ce film en se disant "Ok, et donc ? ".
En creusant un peu, le film distille son lot de réflexions sur : la jeunesse, la difficulté de trouver une place, l'impossibilité de se définir autrement qu'au travers de l'autre... Ce sont des adultes qui se créent sous nos yeux. Et bien que l'on veuille être considérés comme tels, c'est dur d'être un adulte en sortant du lycée...
En utilisant un duo de personnages très efficace, Lilti parvient à dire toutes ces difficultés, ces angoisses, ces frustrations, ces incertitudes qui font la vie d'un étudiant. Il s'appuie pour cela sur un binôme de comédiens d'une justesse rare. On savait Vincent Lacoste capable de jouer dans différents registres et il prouve à nouveau qu'à l'économie, c'est là qu'il est le plus convaincant. On souffre pour lui et même dans ses pires moments, l'efficacité de son jeu tout en profondeur simple parvient à maintenir l'attachement que l'on a pour son personnage. La révélation reste toutefois William Lebghil qui, on l'espère en voyant ce métrage, a su se débarrasser de son image liée à son personnage dans SODA. Toujours juste, sans artifice, il donne corps à Benjamin. Son personnage semble lisse en comparaison de celui d'Antoine mais c'est dans la nuance et avec subtilité que Lebghil lui offre une consistance et une pertinence rare. Contrairement à Antoine, il est là pour que son père le remarque et non pour devenir médecin. Si l'un semble faire de la réussite une question de vie ou de mort, l'autre a un objectif plus personnel. Antoine sait l'adulte qu'il veut devenir quand Benjamin apprend au cours de cette année qu'il ne sera plus l'enfant qu'il était et qu'on devient adulte en choisissant pour soi avant de choisir pour les autres. C'est dans les silences et les regards que les deux comédiens atteignent le paroxysme de leur relation à l'écran. La mayonnaise fonctionne sacrément bien entre les deux.
Si le film semble donc insuffisant pour être mémorable dans un premier temps, c'est en le décortiquant et en se laissant séduire par les deux acteurs principaux que l'on y voit la beauté. Et l'on ne peut s'empêcher de se dire qu'Antoine mérite la réussite de Benjamin et Benjamin mérite le père d'Antoine... Heureusement qu'ils se sont trouvés, soutenus, engueulés car la vie est parfois injuste... Quand on ne sait pas où on va, il vaut mieux être bien entouré. Quand on sait où on va aussi d'ailleurs...