Ce n’est qu’en 1979, soit vingt ans après sa réalisation, que ce quatrième long-métrage de Francesco Rosi (le deuxième réalisé en solo après La sfida un an plus tôt) fut exploité dans les salles françaises ! Resté longtemps rare, Profession magliari propose pourtant une rencontre inattendue et qui demeurera unique entre un réalisateur néoréaliste (Francesco Rosi) et un acteur de comédie (Alberto Sordi), deux artistes œuvrant dans des registres éloignés.
Le fruit de cette rencontre convainc sur de nombreux points même si le film pâtit d’un rythme pas toujours assuré et d’une séquence un peu caricaturale (vente de tapis à une allemande). Les deux personnages principaux sont incarnés par Alberto Sordi, parfait marchand itinérant aussi volubile que cynique, et Renato Salvatori qui peine à se hisser au niveau de son compagnon de jeu. Autour de ces deux protagonistes, Rosi parvient à faire vivre de nombreux personnages secondaires et magnifie la beauté de Belinda Lee.
À travers son cinéma néoréaliste, le metteur en scène réussit dans ce film à déplacer un certain microcosme italien en Allemagne (Hanovre puis Hambourg) en suivant la trace des « magliori ». La survie de ces immigrés et marchands italiens passent par quelques combines au sein de réseaux commerciaux souterrains confrontés à la concurrence d’autres immigrés (Polonais). La belle bande originale peuplée de hits des années 50 contribue à cette restitution subtile.
Entre comédie italienne, romance latine et la toujours présente nostalgie du pays, Rosi rend compte des conditions de vie de ces immigrés italiens en Allemagne ce qui vaut pour constat social. Notons au passage la belle exploitation de la profondeur de champ sur les scènes de groupe (l’action à suivre n’est pas nécessairement celle présentée au premier plan). Au final, Profession magliari fait mouche et trouve sa place parmi les œuvres tragicomiques à voir.