Qu'un seul tienne et les autres suivront par NicoBax

Plutôt pas mal. Un peu agaçant par moment par son coté très "cinéma français intello", la réalisatrice use et abuse des ellipses avec plus ou moins de réussite, certains personnages sont un chouya trop caricaturaux ou les ficelles un peu grosses pour permettre à certaines histoires de progresser. Malgré tout, chacune est intéressante à suivre. Laure l'ado sage et garçon manqué qui s'amourache d'Alexandre le rebelle rêveur va voir sa vie prendre un tournant qu'elle n'aurait jamais imaginé, Zora devra chercher les réponses à la mort de son fils en gardant son secret et Stéphane va devoir prendre ses responsabilités, à tous les niveaux.

Tous ces destins finiront par se croiser sans le savoir, toutes prétextes à aborder la prison sous un maximum d'angles différent qui sauvent d'ailleurs le film de certaines limites dues à son casting (Elsa l'alcoolo, Alexandre dans la 2nde moitié du film, Céline la madeleine). La prison est donc vue comme un cul de sac, une étape et même une échappatoire pour ceux qui y résident mais ceux qui sont toujours dehors ont droit à la parole. Comment vivent les familles des enfermés ? Comment continuer à aimer quelqu'un qui a commis l'impardonnable ? Comment faire face à ce que la prison réveille dans ceux qui y sont enfermés ? Et la liberté est-elle monnayable ? Beaucoup de grandes questions, rarement évoquées pour certaines et vues justement par la réalisatrice. On évite le trop didactique et le trop cliché pour s'attarder sur les ressentis de ceux qui sont dehors, enfermés eux aussi quelque part.

Le casting soutient beaucoup le tout. J'ai découvert Reda Kateb en Jordi le Gitan dans "Un prophète", j'avais été assez impressionné par ce que dégage le mec, son attitude, son allure, son naturel. Là on le retrouve dans un rôle a priori à l'opposé de celui qu'il campe dans le film d'Audiard, Stéphane est une victime de la vie, ceux qu'on qualifie de raté parce qu'ils gâchent systématiquement les chances qu'on leur donne. Et là encore, il m'a impressionné. Aussi crédible en mec au bout du rouleau qu'en amoureux malheureux, en victime made in France d'en bas qu'en voyou cramé. Je suis très curieux de voir la suite de sa carrière, sacré bonhomme.
Assez impressionné par Pauline Etienne. Crédible, toute en finesse, en subtilité. Je me souviens de quelques filles un peu comme Laure du film, plus matures, lointaines, déjà graves et la jeune comédienne le restitue très bien. Sa rencontre avec Alexandre, sa première fois, la suite. C'est froidement réaliste et assez désespéré. Y a juste sa relation avec Antoine (Julien Lucas) que je trouve un peu artificiel.
Quant à Farida Rahouadj, même si son personnage est un petit peu cliché (l'éternelle mère maghrébine, digne dans sa douleur, prête à tout pour sa famille), elle est touchante. Meurtrie dans sa chaire à la mort de son fils, habitée par l'incompréhension (double, sans trop en dire), puis ébranlée dans son chagrin par celui de la sœur du meurtrier de son fils.

Pas mal du tout donc, que ce soit dans le propos que dans le casting, quelques lourdeurs mais vraiment humain.