Qu’Allah bénisse la France par ines_yg
L'image est l'un des points forts du film. Un noir et blanc, ça fait beaucoup de bien, quand la couleur est aujourd'hui la norme.
L'acteur, aussi : vous pourrez (re)découvrir Marc Zinga, troublant par l'intensité de son regard et de sa voix. Un avis plus mitigés pour les autres acteurs, dont on sent pour certains l'effort d'interprétation.
Quant à la réalisation : l'environnement dans lequel évoluent les personnages, une cité de Strasbourg, est très bien ressenti. Abd Al Malik a à coeur de montrer la vie dans la cité telle qu'il l'a vécu, soit une réalité se détachant des images pré-reçues que nous en avons, crées et alimentées par les informations que nous en délivrent les médias.
Il y montre, au cours du film, les amitiés qui s'y créent, les moments de partage, d'espoir, de joie. Mais aussi l'autre facette, principalement celle de l'engrenage des jeunes dans les trafics de drogue, par la manipulation et l'attrait de l'argent facile, là où leur "champ des possibles" est extrêmement réduit. La description de la violence de l'univers masculin que les personnages fréquente, et qui oriente (et explique) leurs actions et leurs stratégies, est à mon sens la grande réussite de ce film.
En revanche, le film évoque d'autres thèmes, qui sont moins bien traités, et notamment l'échappatoire que constitue la religion musulmane : par le titre du film et connaissant le parcours du réalisateur, on s'attendait à ce que sujet soit particulièrement traité, or il est plutôt périphérique. Il était évidemment extrêmement difficile de montrer, dans un film, la révélation que constitue le choix d'une religion. Mais du coup, on reste sur sa fin : pourquoi son choix ? Comment évolue-t-il dans son cheminement philosophique et religieux ?
Autre chose, sans vouloir trop en révéler : ce film est autobiographique, mais ne durant qu'une heure et demi, il ne s'attache qu'à certains éléments de la vie du réalisateur et en laisse d'autres dans l'ombre. Notamment, son rapport à la culture qu'il se forge par ses lectures et ses études (on le voit juste de temps en temps un livre à la main, faisant tâche à côté de ses amis), mais aussi la façon dont il se sort du cercle de délinquance et du trafic de drogue, alors que ceux qui l'entourent n'y arrivent pas.
Le premier film d'Abd al Malik est à voir, parce qu'il est une façon d'appréhender une réalité sociale cruciale, et parce qu'il amène à la discussion, au débat.