Quand Harry rencontre Sally fait partie de ces rares comédies romantiques qui supportent la comparaison avec les grands classiques des années trente, quarante et cinquante. On y verra aussi bien entendu l’influence prégnante des comédies romantiques New-yorkaise de Woody Allen, musique jazzy comprises.
Si le film de Rob Reiner se trouve en aussi bonne compagnie, c’est sans doute parce que tout comme ses augustes prédécesseurs, il ne cherche pas à édulcorer l’amour, à le sucrer jusqu’à lui ôter un peu de sa force primale. Plutôt que d’enfiler les clichés jusqu’à l’écœurement, le film opte pour une recette un brin plus subtile en abordant le sujet avec une pointe de réalisme, une pincée de cynisme, et bien sûr, aliment essentiel à la réussite de ce genre de film : une bonne dose d’humour.
Le coté cynique et désabusé imputé au personnage d’Harry sera inspiré par les l’humeur de Reiner, tout juste divorcé, ainsi que par se dialogues avec ses amis dont Billy Crystal, tandis que la scénariste Nora Ephron s’inspirera d’elle-même et de ses amies pour le personnage de Sally.
Harry et Sally n’étaient pas destinés de tout temps à être ensemble. Ce n’est pas pour eux l’amour au premier regard. Leur relation évoluera au fil du temps passant de inimitié à l’antipathie, puis à l’amitié avant que leurs sentiments mutuels les rattrapent. Est-ce que hommes et femmes peuvent être amis sans que le sexe vienne s’en mêler ? Est-ce qu’on peut tomber amoureux de son ami et espérer que ça marche ? Autant de question pour lesquelles il faudra regarder le film afin d’obtenir les réponses.
Donc oui, ici, l’amour est un sentiment mutuel qui ne tient pas du premier regard mais se construit avec le temps, se renforce petit à petit, et dans lequel les deux partenaires se complètent mutuellement. Le cynisme désabusé de Harry, incarné ici par un Billy Crystal qui y trouve simplement le rôle de sa vie, et le romantisme exacerbé de Sally incarné par une Meg Ryan au sommet de sa gloire, et qui sera abonnée à rejouer peu ou prou le rôle de Sally pendant un peu plus d’une décennie crée un décalage savoureux entre les personnages.
Le film est donc un savant mélange d’originalité et de choses plus attendues, mais dés qu’on a l’impression que le film va s’endormir sur les lauriers confortables du déjà-vu, il se relance, que ce soit grâce à un dialogue amusant, un contrepoint ironique ou une scène particulièrement marquante et réussie.
Le film entraînera un regain d’intérêt pour le genre de la comédie romantique et pléthore de films du genre plus ou moins anecdotiques envahiront les écrans suite à son succès. On n’en retiendra que très peu, et ce seront les anglais et particulièrement Richard Curtis qui tirera son épingle du jeu durant la décennie des années 90 et les suivantes.
Meg Ryan s’illustrera dans un grand nombre de comédies américaines et multipliera les partenaires de jeu. On n’en retiendra vraiment que Nuit Blanche à Seattle avec Tom Hanks pour partenaire et You’ve got mail avec le même duo qui reste un bien triste remake du génial The Shop Around the Corner d’Ernst Lubitsch.
Billy Crystal continuera à balader sa trogne entre films, films d’animation et présentation de cérémonie des oscars (neuf fois) avec toujours l’air de ne pas y toucher qu’on lui connait.
Mais peu importe ! Ces deux-là resteront toujours un peu Harry et Sally. On gagnera à regarder leurs péripéties amoureuses à deux sous la couette entre deux fêtes et à s’amuser du film de Rob Reiner tout comme Harry et Sally s’amusent lorsqu'ils regardent le Casablanca de Curtiz.
Parce que regarder un bon classique, ça fait toujours un bien fou et c'est toujours une belle manière de clôturer l'année et d'en commencer une nouvelle.