Cette courte fiction en dit long sur la société marocaine. Hachem aide de tout son cœur sa fille Amina, une jeune veuve, qui élève ses trois enfants. Il adore Sara, une fillette de huit ans, qui le lui rend bien. Un jour, un homme frappe à la porte et fixe Amina en silence. Elle doit comprendre par elle-même qu'un malheur est arrivé. Amina s'affole, que se passe-t-il ? La mort est taboue, en parler porterait malheur à l'imprudent... L'homme préfère présenter ses condoléances... Alors d'autres voisins portent le grand-père dans la maison.
Nous ne saurons jamais comment Hachem est mort : crise cardiaque ? fauché par un véhicule ? Il ne faut pas en parler, bouche cousue... Une voisine plus âgée ordonne à Amina de rester avec les femmes qui viennent d'entrer et lui interdit de s'occuper de son père. Désorientée par cette mort subite, Amina n'est plus chez elle. Le porte-parole des hommes ordonne aux deux garçons : "Il n'est pas question de larmes !" Ce sont eux maintenant les hommes de la famille. Ils doivent aider à la toilette mortuaire dans une pièce voisine, dont on ferme la porte...
Reléguée avec les femmes, Amina veut veiller son père, lui parler, passer les dernières heures avec lui. Au nom de "la religion", la cheftaine le lui interdit : "Quel malheur ! Cela ferait fuir l'ange qui doit venir cette nuit pour ton père !" Les femmes prient, trois hommes récitent le Coran. Religion et superstitions sont de merveilleux prétextes. Ainsi le groupe des voisins contrôle sévèrement les membres de la famille. Tous doivent suivre les rites imposés, mêmes absurdes. Amina veut agir selon son cœur ? Impossible ! Suivre les codes sociaux et multiplier les interdits permet d'évacuer l'émotion et de contrôler les individus.
Cependant il est tard, les voisins finissent par quitter la maison. Non sans répéter à Amina qu'elle ne doit surtout pas voir son père. Qu'elle aille dormir dans sa chambre avec Sara ! Le titre de ce film émouvant "Quand ils dorment" a plusieurs sens. Je vous laisse les découvrir, comme ce qui se passe dans la maison au cours de la dernière nuit d'Hachem sur la terre.