Les premières images sont brutales.
Téchiné, 73 ans n'a rien perdu, après plus de vingt films, de son énergie. Elle est autant impressionnante que parfois frustrante.
Le film démarre sur les chapeaux de roues, pour mieux représenter la fougue, l'énergie, la violence de l'adolescence mise en scène. Cela marche bien si c'est justifié par cette analyse. Or cela ne l'est pas toujours. Outre cette aspect brutal déjà évoqué, ce sont nombres de scènes qui partent à la poubelle à cause de coupures abruptes et incongrues, littéralement au milieu de certaines situations. De plus, l'image, caméra à l'épaule, est instinctive, souvent laide, similaire à une approche documentaire, parfois même de la télé-réalité, avec de gros zooms nerveux et hideux.

Enfin les images mises en parallèle sont souvent sans cohérence aucune, et impactent justement sur l'incohérence ressentie de l'intrigue.
Car si Téchiné dresse ici un beau constat de l'adolescence, pas caricatural du tout, où les ados ne sont ni anarchistes, ni drogués, ni à problèmes (cela grâce au jeu des deux comédiens, l'un troublant d'apparente simplicité mais bouillonnant de violence, l'autre troublant de justesse de ton), et il faut le souligner car c'est la la grande qualité du film, l'intrigue pour autant reste autant incohérente que déroutante.
Le rapport entre les deux garçons est ridicule. La violence de départ, qui sert de postulat à l'intrigue et de lieu de rencontre entre les héros n'est jamais expliquée ni justifiée, purement gratuite et incohérente, résumée seulement par une risible explication évasive au moment où cette partie du film est oubliée et que l'intrigue a déjà bien progressé. Ensuite, l'idée de faire vivre ensemble deux garçons qui se haïssent et ne cessent de se détruire la gueule successivement à l'école est la pirouette scénariste que la moins maligne qui soit. Surtout qu'elle ne provoque chez les deux héros aucune rébellion réelle... Qui pourrait, surtout à cet âge, supporter telle situation sans piper mot ? Et la candeur et la naïveté avec lesquelles les deux parents imposent cette idée qui leur semble la plus charitable qui soit renforce le côté insupportable du truc.
Enfin, et c'est le sujet même du film, l’homosexualité est traitée sans finesse et tombe dans l'intrigue comme un cheveu sur la soupe, comme un sujet devenu obligatoire lorsque l'on traite de l'adolescence dans notre société de 2016. Tout cela est horriblement mal traité, et s'impose brutalement dans l'intrigue après près d'une heure de film.
Scène de sexe la plus gênante du siècle à l'appui.
Le film accumule l'effet yo-yo tourne autour du pot puis fonce tête baissée dans le sujet pour quitter toute la sensibilité et pudeur qu'il parvenait à avoir. Cela devient inconstant, souvent mal écrit, malgré l'incontestable conviction des comédiens (même si Kiberlain, dans sa justesse, souffre d'un rôle mal traité et parfois insupportable, et de fait pas très attachante, la faute à une famille trop idyllique, parfois jolie, mais souvent fausse).
Et puis au générique, si l'on ne le savait pas auparavant, on voit la présence, à l'écriture du scénario, de Céline Sciamma.
Et puis on comprend.
Non Mme. Sciamma, le rapport entre deux hommes de cette génération ne se résume pas à un jeu constant de domination et de violence ni à son extrême inverse, une ambiguïté sexuelle qui transcenderait tout amitié. Le discours social et (presque) politique prend le pied sur votre histoire d'amour. Vous jonglez avec deux extrêmes sans jamais saisir le juste milieu. Dés qu'il y a rapport entre deux garçons à l'adolescence il y aurait donc forcément domination violente qui cacherait un amour refoulé, inavoué, une attirance.
C'est très chiant, c'est jamais gratuit.

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le 29 avr. 2016

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Charles Dubois

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