Il y a des films comme ça qui arrivent sans faire de bruit et qui se révèlent aussi fragiles que précieux. "Queen of Montreuil" est de ceux-là. Il a failli ne pas voir le jour : les refus de financement ont été nombreux et ont failli décourager Solveig Anspach qui a laissé son projet dans un coin de sa tête pendant plusieurs mois. Et puis Robert Guediguian l’a encouragée : il fallait que ce film existe. Il n’est pas étonnant que le réalisateur de "Marius et Jeannette" ait à ce point insisté car "Queen of Montreuil" parle beaucoup de solidarité, d’entraide, au sein de la communauté d’un quartier.
Pas de Tour Eiffel ou de Sacré Cœur à Montreuil, mais des grues d’où l’on surplombe tout la ville, d’où l’on peut surprendre les habitants dans leurs occupations quotidiennes, banales ou insolites.
"Queen of Montreuil" parle de gens que le hasard de la vie à fait se croiser. Des étrangers qui pourraient faire partie de notre famille. Des familles que l’on se rêve et que l’on se construit. Le film semblera immédiatement inconsistant aux yeux de ceux qui ne jurent que par les scénarios qui imposent leur discours et leur morale édifiante, laissant le spectateur quitter la salle en ayant le sentiment qu’il a « compris » quelque chose, qu’aucun enjeu ne lui a échappé. Or, "Queen of Montreuil" s’offre le luxe d’être une divagation, une rêverie, sans grande péripétie, mais plein de surprises.
La reine dont il est question dans le titre, est cette jeune veuve qui tente de surmonter son deuil. Mais le film ne se hâte pas de l’extraire de son chagrin, d’ailleurs, lorsque le générique de fin arrive, rien n’assure qu’elle s’est sortie de cette épreuve. Le film laisse l’inattendu se produire. La fantaisie y est à son aise. Porté par Florence Loiret-Caille dans le rôle titre, il nous colle un sourire aux lèvre pendant la projection. Les héros sont lunaires, perchés (au propre comme au figuré), à côté de leurs pompes. On aimerait être leur ami. On l’est, au moins, durant 1h27.