Queer
5.9
Queer

Film de Luca Guadagnino (2024)

Années 50. W. Lee (W. Burroughs dans une vie fictionnée), expat’ américain au Mexique. Opiomane, héroïnomane et queer. Tombe en pâmoison, d’un amour romantique du siècle précédent, du bel éphèbe E. Allerton (E = Eugène, un prénom qui devient ici so madly romantic). Lui-même expat’ américain, journaliste, queer (assumé) en devenir et joueur d’échecs avec une énigmatique femme rousse. La première partie de l’histoire se déroule dans les bars à l’humeur moite suffocante de tequila et de bestioles exotiques symboles d’adaptation.


Au chapitre II, Lee et Allerton forment un couple en Amérique du Sud. Allerton reste distant : est-il si queer ? En attendant la réponse, il assume le sevrage de Lee atteint de tous les symptômes du junky en manque.

Plus tard encore : les deux dans la jungle à la recherche du yagé, cette plante télépathique que seul le docteur Cotter, une sorcière, peut administrer (si elle veut). Ils vomissent leur cœur et fusionnent.


À ce stade du film, on se situe entre « La Plage » et « Indiana Jones ». Dans un monde parallèle et jusqu'ici inconnu.

Le film est plus expérimental que n’importe quel shoot de drogue. Pure. Daniel Craig, dans le rôle de Lee est d’une beauté fracassante, à la lucidité ironique irrésistible. Il joue là son va-tout en tant qu’acteur, magistral. Comment ne pas succomber ? Il éclipse tout : sa démarche de dandy, son panache de queer même au bord de l’overdose, son sourire et son regard puissants, sa retenue. Je crois que tous les acteurs en rêvent, d’un rôle aussi insane qu'amazing.


Le film oscille entre rêve et réalité, ultra chorégraphié, l’haleine se rapproche toujours davantage du torride sans jamais l’atteindre à force de sophistication. Je suis sûre que c’est cette ambiance précise, que capte Luca Guadagnino le réalisateur, qu’ont vécue Burroughs, Ginsberg et leurs pairs beats, créant quelque chose d’intense, qui se grave, quelque chose d'inénarrablement poétique.


Uu air du temps aujourd'hui évanoui.


Un film ? Un voyage spatio-temporel jouissif, à vivre sans attendre, sous-titré d'une musique glam' et suspensive, qui interrompt le cours de la vie et fait planer d'extase.

Isabelle-K
9
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le 8 avr. 2025

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Isabelle K

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