Babel without a cause
Le cinéma de Cristian Mungiu appartient à cette catégorie si facilement caricaturable, cochant à peu près toutes les cases du film d’auteur à festival : roumain, social, long, d’un pessimisme...
le 21 oct. 2022
30 j'aime
R.M.N. est le 6è long métrage de Cristian Mungiu après notamment 4 mois, 3 semaines, 2 jours en 2007 et Au-delà des collines en 2012. Le titre roumain est IRM et il est curieux qu'ils l'aient changé pour la version française, cependant RMN peut faire penser à "Roumanie", et donc ça colle, car ce film à travers le prisme de l'émigration donne une image en 3D de la Roumanie, et en particulier de la Transylvanie, région où se déroule l'histoire, région située entre la Serbie, la Hongrie, l'Ukraine, la Moldavie et la Valachie.
La scène d'ouverture ne se passe pas dans cette région mais en Allemagne dans un abattoir. C'est la que travaille Matthias émigré roumain. Les types qui travaillent dans les abattoirs ne sont généralement pas les plus humains, mais quand l'un de ses collègues le traite de feignant et de Gitan, il lui met directement un coup de boule et l'envoie traverser la vitre. Parce que Matthias c'est un violent, faut pas le chercher. Du coup, obligé de fuir ses responsabilités et retourner dans son pays. Sa vie la bas, ce n'est pas non plus terrible. Il a laissé la charge de son fils à sa mère dont il est séparé (il la battait) et lui se tape une voisine, Csilla, d'un milieu social plus élevé (elle joue du violoncelle dans l'orchestre local et boit du vin tous les soirs dans des verres style USA où l'on peut mettre directement la moitié de la bouteille). On se demande pourquoi Csilla se tape ce rustre, mais c'est surement ça qui doit lui plaire. ce côté violent, brut de décoffrage. Il y a des femmes qui aiment ça. Csilla travaille comme manageuse dans une usine de pain dont une autre femme est la patronne. Seulement ils peinent à recruter car beaucoup de travailleurs roumains partent travailler à l'étranger. En Autriche ou en Allemagne par exemple, comme c'était le cas de Matthias. Libéralisme économique, capitalisme extrême dérégulé, délocalisation du travailleur ... La direction de l'usine choisit de faire venir des travailleurs du Sri-Lanka, pays où la main d'œuvre est bon marché, mais pour eux un salaire roumain, c'est toujours mieux que chez eux. Alors ils laissent derrière eux leurs familles à qui ils vont envoyer de l'argent et son prêt à travailler dans un pays où il fait gris et où il y a des vampires. Des vampires et des ours. Et les ours ne sont pas forcément ceux qu'on pense. Roumains-roumains et roumains-hongrois ne veulent pas de ces Sri-Lankais chez eux. Si certains sont ouvertement racistes, d'autres trouvent le prétexte qu'ils ne veulent pas qu'ils leur ramènent des maladies. Bref, assez rapidement on veut les mettre dehors et ils reçoivent des menaces de mort.
Une radiographie de la Transylvanie, de la Roumanie, mais qui pointe du doigt les problèmes de l'Europe et d'un monde perdu où quand on ne fait pas venir de la viande de l'autre bout du monde alors qu'on en produit localement, on fait venir de la main d'œuvre de l'autre bout du monde alors qu'il y a un nombre croissant de chômeurs. Un monde qui marche sur la tête ... Réalisateur très talentueux avec regard cru, réaliste, naturaliste, à continuer à suivre.
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Créée
le 2 mars 2024
Critique lue 17 fois
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