Il n’est ni militaire, ni mercenaire, ni touriste. Il ne parle pas, il grogne, il ne négocie pas, il extermine. Sorti en 1988, soit trois ans après le deuxième opus, Peter MacDonald, aidé de Sylvester Stallone pour le scénario, reprend la réalisation après le remplacement du réalisateur Russel Mulcahy, et fait partir le célèbre vétéran du Vietnam en Afghanistan. Troisième volet de la saga, Rambo se retrouve cette fois au milieu d’un conflit opposant moudjahidin et Russes, tout en tentant de sauver son mentor…
Le mal aimé de la saga
Après un brillant premier film, puis une suite défendable, voila que débarque un épisode 3 certes spectaculaire, mais ô combien nanardesque et caricatural. Non dénué pour autant d’un message et autre réflexion (comme les difficultés relationnelles entre ces moudjahidin et les Etats-Unis), Rambo 3, tout comme ces prédécesseurs, permet de nous éclairer sur diverses périodes importantes de l’histoire américaine. Fini la forêt humide dans une petite ville tranquille aux Etats Unis, fini la jungle Vietnamienne. Tourné pendant 3 mois en Israël, sur la mer Morte, place au désert rocailleux d’Afghanistan.
Bourré de cascades grandioses, déchainant une avalanche de scènes d’action de tout type (fusillade, explosions, combats au corps à corps, cascades à cheval, cascades en tank, cascades aériennes en hélico,…), bien que John Rambo n’est plus rien à voir avec le John Rambo de First Blood 1 et 2, ne gardant que son coté machine de guerre torturée et seule contre tous, Rambo 3, plus léger, plus riche coté répliques cultes et autres scènes volontairement hilarantes, fera la joie des amateurs d’action bourrin.
Dans cet épisode 3, notre soldat devient une sorte de mercenaire en prenant sévèrement pour son matricule. Vous aussi, grâce à Rambo, apprenez à vous soigner tout seul d’une blessure par balle. Pour cela, rien de plus simple : retirez délicatement l’éclat de métal coincé, ouvrez une balle de fusil (mitraillette, pistolet ou autre), introduisez-là dans le trou causé par la balle, et mettez-y le feu. Ok, ça fait mal mais au final, vous vous sentirez bien cuit, et pourrez repartir casser la gueule aux responsables de votre bobo. Terminé le soldat traumatisé, place à une véritable bête inarrêtable, pas très causante à la voix roque, pas très élégante et ne faisant surtout pas dans la finesse.
Rambo ne fait pas dans la dentelle, il fonce dans le tas, point barre. Pour sa reconversion, il aurait pu être mécanicien ou boucher, mais non. Rambo, c’est un sang chaud, un cogneur. Pour ça, il gagne sa croute en faisant des combats clandestins, tout en faisant en parallèle un boulot un peu plus soft et légal : bricoleur dans un monastère en échange d’un toit où dormir.
Lorsque son mentor se fait capturer puis emmené dans une forteresse où sévit un colonel adepte de la torture, l’ancien soldat reprend les armes. Jouant une petite partie de foot local où on se déplace à cheval et la balle est remplacée par un bouc, s’infiltrant dans les lignes ennemis de l’armée russe et un groupe de commando Spetsnaz, éliminant ses ennemis à vitesse grand V (plus de 132 morts, qui dit mieux ?), échappant par miracle à des tires ennemis sans aucun doute anciens Stormtroopers, tirant à l’arc des flèches explosives, vidant pratiquement le chargeur d'une mitrailleuse gros calibre sur de gros hélicoptères russes en hurlant de colère, affrontant un colosse hyper balèze interprété par Randy Raney (le même bouledogue qui affronta Stallone dans « Bras de fer »), Rambo prendra même le temps de se lier d’amitié avec un jeune orphelin combattant atteint sans aucun doute de pléonexie (je peux avoir ton couteau porte bonheur ? Je peux avoir ton collier ?).
Rambo 3, au premier abord, on a la sensation que tout comme d’autres films du genre, il respire le machisme et la testostérone à plein nez. Et pourtant, demeure cette parcelle d’émotion : John, toujours aussi pensif, toujours hanté par son passé, s’identifiera au groupe des moudjahidines, se battant eux aussi pour le droit d’être libre. Ba quoi ? La vie de soldat surentrainé, ça n’empêche pas d’avoir un cœur tendre ? Justement, quand on parle de Rambo, on l’assimile d’emblée à cette machine à tuer bête comme ces pieds aux gros muscles. Si on gratte un peu plus en profondeur, c’est un tout autre personnage que nous voyons.
Sous ses allures de grosse brute blasée, c’est un grand sensible incompris, un type ayant connu des atrocités de la guerre, un bouc émissaire qui n’a jamais pu se défendre, un homme n’arrivant plus à communiquer avec le monde qui l’entoure (le seul qui réussit à communiquer avec lui c’est le colonel Trautman) et donc obligé de vivre seul reculé de toute civilisation, un individu luttant sans fins contre ses démons, un être humain comme les autres qui a fait des mauvais choix dans sa vie. Rambo n’est donc pas qu’un bourrin. Nous avons surtout affaire à un homme refusant d’être qui il est, et qui l’acceptera enfin dans le quatrième et dernier épisode.
« Vous avez l’expérience de la guerre, Monsieur Rambo ? - J’ai vidé
quelques chargeurs. »
Il est le pire cauchemar des Soviétiques
Aux premiers abords, malgré ces brefs moments d’émotion, cet épisode 3 ne fait qu’exploiter le potentiel du action hero. Et si on se trompait depuis le début ? Et si on avait mal jugé ce film ? Il est vrai qu’objectivement, Rambo 3 n’a rien du film psychologique qu’il était au départ de la saga. Pourtant, il y persiste une légère trace de ce héros torturé, une bribe de psychologie profonde lors d’un nouveau petit discours et autres passages dramatiques/sérieux en début de film. De temps à autres, nous aurons des petits élans de dramaturgie. Pour tout le reste, le cahier des charges de l’action movie est rempli. Au final, on n’attendait rien de plus. Le scénario est simple, idem pour les dialogues, les acteurs font le job, la mise en scène est efficace et travaillée, pas de véritables enjeux si ce n’est le sauvetage de Trautman et quelques prisonniers au passage, on se permet même de rajouter des répliques profondes, poétiques, voir philosophiques telles que :
- Où est-ce que les missiles sont localisés ? - Tout près... - Où ça ? - Dans ton cul !
- Qu’est ce que c’est ? - Une lampe bleue... - Et ca fait quoi ? - Du bleu.
- Mais pour qui prenez vous cet homme ? Pour Dieu ? - Non, Dieu aurait pitié, pas Rambo.
Subsiste toutefois dans ce nouvel épisode des points positifs, comme quelques dialogues parsemés de ci de là, empêchant ce film d’être un ratage total et un mauvais Rambo. Ces dialogues, ils sont importants, ils apportent ce qui fait le charme et la complexité de la saga des Rambo.
« Tu as dit que pour toi ta guerre était finie. Peut être celle à
l’extérieur mais pas celle à l’intérieur de toi. »
Terminator 3, Robocop 3, Mad Max 3, à chaque troisième opus de saga, la malédiction du « 3 » s’abat sur les franchises cultes. Les scénaristes et sociétés de productions ne veulent pas faire du réchauffer. Pour ça, on garde les bases, on tente de faire évoluer son personnage, on adoucit l’atmosphère en s’entêtant à coller de l’humour histoire de gagner le cœur d’un autre groupe de spectateurs. Conséquence : maladresse en veux tu en voilas. On tourne son héros charismatique en ridicule (ou pas loin du ridicule) et le film, violent au départ, finit par écoper d’un « tout public », tout en essayant de garder un peu de sérieux quand il le faut. Mais trop tard, on a déjà fait son opinion. A partir de là, ce qui faisait le charme du premier et deuxième opus s’estompe, ça sent la censure à pleines narines. Soit ça finit à la parodie, soit on s’en rapproche. Rambo 3 n’y coupe pas, et on comprend pourquoi « les Guignols de l’info » ne l’ont pas raté. Certes, Rambo 3, c’est un nanar, oui, mais un nanar défoulant et, ô surprise : réfléchi, si tenté que vous rallumiez votre cerveau lors des moments calmes.
On a besoin de films comme Rambo. Ne serait ce que pour décompresser, nous laver de toute cette colère qui nous habite, mais aussi pour découvrir les coulisses du monde des politiques et gouvernement. Que serait le cinéma actuel sans tout ces personnage iconiques ayant marqués l’histoire du cinéma ? Trouvez-moi des héros actuels si charismatiques, si authentiques que des Max Rockatansky, Snake Plissken, John Rambo, James Braddock, Dalton Turner, Terminator, Indiana Jones, John McClane, Ellen Ripley. Trouvez-moi un film d’action débordant de créativité, tout en ayant une critique profonde du monde et son avenir peu glorieux ? Que ce soit le travail sur les musiques, les bruitages, les costumes, les décors ou bien les effets spéciaux, hormis Mad Max Fury road et quelques autres petites perles montrant leur bout du nez une ou deux fois par ans, le genre action n’est plus ce qu’il était. Où sont ses films bourrins sur la forme mais réfléchis sur le fond ? Profitons donc des petits bijoux du cinéma d’action des eighties.
Au final, Rambo 3, il est à l’image de ce qu’était Rambo 2, l’humour en plus. Bon film d’action, moyen Rambo, on espérait mieux. Ce troisième opus ne révolutionnera pas le genre, et bien qu’il soit un nanar, pur défouloir assumé, divertira, faisant passer un bon moment aux amateurs de films d’action avant de retrouver le Rambo qu’ils connaissent tous dans un quatrième et dernier opus d’anthologie.