Ran de Kurosawa reprend la trame du Roi Lear de Shakespeare. C’est une adaptation très libre mais qui garde intact l’articulation de l’histoire et les thèmes de la corruption par le pouvoir, de la vengeance, de la folie.
Ici c’est donc un seigneur japonais : Hidetora qui divise le pouvoir entre ses 3 fils. Son benjamin prédisant les malheurs d’une telle division se verra répudié pour son honnêteté et la remise en cause des choix de son père. L’aîné, devenu chef du clan, ne tarde pas à vouloir affermir son statut. Ce père, toujours en vie, est une gêne. Bien aidé par une épouse manipulatrice, il finira par bannir son père. Cherchant refuge chez son 2è fils, le seigneur Hidetora se verra à nouveau rejeté et errera en compagnie de son fou et d’un guerrier resté fidèle.
Esthétiquement Ran est tout simplement magnifique. Les vastes paysages s’animent des couleurs des différents clans. Les scènes de batailles sont extrêmement prenantes et j’ai particulièrement apprécié celle du château sur fond musical sans aucun son diégétique et ces plans d’un Hidetora catatonique alors que des flèches enflammées traversent l’écran.
Néanmoins, sur le fond, Ran manque un peu de sentiment. Le sur-jeu des acteurs, fortement influencé par la tradition théâtrale japonaise, en est peut-être la cause. Je n’ai pas eu ce problème dans Rashomon mais c’est une fable philosophique, l’attachement au personnage n’est pas essentiel, ni dans Les 7 Samouraïs grâce à l’humour de Toshiro Mifune ou encore dans Dersou Ouzala car le jeu est plus « classique », mais ici ce sur-jeu m’a parfois dérangé.
Ran reste malgré tout un bon film esthétiquement bluffant.