J'ai réussi à voir Ready Player One sans voir au préalable aucune image du film, sans lire le synopsis et en étant assez impatient vu les nombreux retours dithyrambiques. Sauf que j'ai trouvé ça totalement merdique... Clairement je n'en vois pas l'intérêt une seule seconde, c'est un film calibré au possible, où tout est cousu de fil blanc, où tout est profondément prévisible et surtout sans réelle audace. Alors oui Spielberg sait filmer, mais il filme quoi là ? Un jeu vidéo moche qui ressemble à Arthur et les mini-moi ? C'est profondément gênant d'en arriver là.
Mais surtout de son jeu vidéo il n'en fait rien, on commence avec une voix off qui nous raconte dans quel univers on est, difficile de faire plus convenu, mais surtout cet univers n'existe pas. Je veux dire il ne tient pas debout trente secondes. On aurait un jeu où tout le monde jouerait... mais qui produit à manger ? comment ces gens là gagnent leur vie ? Tant de questions sans aucune réponse. Au départ je pensais que lorsque les gens avaient trop de dettes ils devenaient des esclaves de l'organisation des méchants, mais en fait ces esclaves sont également utilisés dans le jeu pour effectuer des tâches ingrates. Donc dans le film on ne nous montre rien qui produit la moindre ressource physique réelle. Parce que bon leurs casques de réalité virtuelle faut bien les produire également. Dans cet univers incohérent comment suis-je censé éprouver de l'empathie pour ces gens qui n'existent pas ? Qui ne sont que des avatars de jeu vidéo sans âme ? Des personnages-fonctions, totalement dénués de charisme, d'émotion...
D'ailleurs dans cet univers les gens meurent et on s'en fout totalement... (et on se demande même pourquoi ces personnages ont été introduit en premier lieu tant ils ne servent à rien)
Mais bon, ça c'est pas le plus grave, car ça serait juste médiocre, mais le plus grave c'est clairement ce que tout le monde adore dans ce film, à savoir le délire « référence porn ». Tout est prétexte à te balancer une référence et te faire « mais si, ça tu connais ». Alors c'est extrêmement flatteur pour le spectateur de base, le même qui trouve que les références chez Godard c'est de la branlette pédante, mais en vrai il en fait quoi de ses références ? Rien du tout. C'est un clin d’œil tellement appuyé qu'à la fin on n'en peut plus. Lorsque le héros lance à un Hadoken c'était juste abominable... Godard lui en faisait de la poésie...
Chacun son truc...
Si tu ton truc c'est de jouer à Où est Charlie pour trouver toutes les références, très bien... en attendant moi je voulais voir un film... Je crois que je ne supporte pas cette manière de flatter l'égo du spectateur; cette manière de l'acheter avec des choses qu'il aime. En plus il y a ce petit côté culpabilisant « Quoi mais tu n'as pas vu Shining ? », comme si c'était une honte de ne pas comprendre toutes ces références, ne pas avoir joué à tel jeu, vu tel film, etc. D'ailleurs toute la séquence dans Shining ne fonctionne que si on a vu le film. L'idée de se balader dans le film n'est pas mauvaise, ou du moins ça ne le serait pas si ce n'était pas autant vidéoludique, transformer Shining en banal niveau de jeu vidéo c'est un peu concon et insultant pour Kubrick (et le spectateur).
On voit le couloir, on voit les jumelles, on sait ce qui va arriver. Quelqu'un qui ne l'a pas vu ne comprend pas... C'est d'ailleurs la référence la plus artistique qui est donnée, tout le reste c'est quand même du jeu vidéo ou bien Breakfast Club... on est clairement un niveau en dessous.
Le problème de toute cette flagornerie reste quand même sa vacuité. Le passage avec Shining est peut-être le seul où la référence sert un peu à quelque chose. On a Godzilla, le Géant de Fer, Jurassic Park, King Kong et j'en passe ça aurait pu ne pas être ces références là, ça n'aurait rien changé au film (et je ne parle pas de Starcraft, Overwatch...)
Même les mondes de Ralph que je n'aime pas non plus arrivait à proposer un univers plus cohérent avec toutes ses références histoire de les faire coexister dans quelque chose qui a du sens. Là vu qu'on te dit que tout est possible, rien n'a de sens, et si rien n'a de sens et n'est plus qu'une vaste farce mi-publicitaire mi-référentielle... Et si c'est pour voir l'imagination débordante d'un grand enfant qui mélange tout, autant revoir L'impitoyable Lune de Miel de Bill Plympton.
Bref, clairement là c'est trop gratuit, trop poussif, trop rentre-dedans pour être sincère. Pour faire une analogie, c'est comme les féministes qui se plaignent en disant qu'un clin d’œil dans la rue de temps en temps ça passe, mais tous les jours, tout le temps, ça devient du harcèlement de rue... Ben là c'est du harcèlement de film.
Le pire dans tout ça c'est que Spielberg aurait une légitimité pour faire un film référentiel, puisqu'il est lui-même, avec d'autres, à l'origine une part importante de cette pop-culture (Indiana Jones, Jurassic Park, E.T. et j'en passe).
Mais si c'est juste pour raconter une quête bidon de jeu vidéo où il faut retrouver des clés et faire croire au spectateur que dans 30 ans un ado saura encore ce qu'était une console Atari, Overwatch, Minecraft, etc, c'est juste être un menteur et ça n'en vaut pas la peine.
Long pour rien le film enchaîne les poncifs du genre, on a même le méchant qui se lance lui-même à la poursuite de ses opposants... Dans quel monde un patron d'entreprise prend une arme pour aller flinguer des ados ? Dans quel monde ?
Pour revenir sur ce monde, il y avait des pistes intéressantes, sur l'addiction, sur le nihilisme, sur le fait que les gens ont arrêté de s'occuper de la vie, de leur vie... Mais le film n'en fait rien non plus. On te balance une fin ultra consensuelle mais qui ne règle rien, qui ne répond à rien... en plus d'être attendue et d'une banalité absolue.
Il ne faut pas se laisser avoir pour cette nuée ardente de références, par quelques mini plans séquences, on est clairement face à rien du tout, si ce n'est une arnaque et de la banalité à perte de vue.
Je crois même que j'ai préféré Pacific Rim Uprising, tout aussi con, tout aussi cliché, tout aussi convenu, beaucoup moins bien réalisé, mais qui avait la décence de ne pas tenter de faire passer sa vessie pour une lanterne.