Rebel est un film sur la jeunesse et ses errements. Kamal et Nassim sont deux frères que leur mère élève seule dans le quartier de Molenbeek à Bruxelles. Elle essaye tant bien que mal de les préserver de la délinquance et de l’endoctrinement religieux. Nassim a beaucoup d’admiration pour son grand frère Kamal. Mais ce dernier est obligé de quitter le pays quand la police découvre que son atelier de réparation de motos sert à entreposer de la drogue. D’abord recruté comme personnel humanitaire dans une ONG en Syrie en proie à la guerre civile, Kamal est bouleversé par le spectacle des atrocités que le régime syrien commet contre sa propre population. Il est alors approché puis enrôlé par l’Etat islamique. Le film commence lorsque Nassim et sa mère visionnent une vidéo qui circule sur les réseaux montrant Kamal en train d’exécuter de sang-froid un soldat syrien. Nassim va alors tout faire pour retrouver son frère.

Classé dans la catégorie polar-thriller, Rebel est d’abord un film sur la quête existentielle. Nassim et Kamal sont plus que des jeunes issus d’un quartier sensible de Bruxelles. En cela, le film accède à une forme d’universalité qui projette une lumière neuve sur les enjeux de la jeunesse et impose de nouveaux critères pour juger de ce qui relève de la marginalité et ce qui relève de l’expression d’une vitalité propre à cet âge.

Bien sûr, tous les jeunes, à commencer par son jeune frère, ne se comportent pas comme Kamal. Les rodéos urbains, le trafic de drogue sont de véritables fléaux dans les cités et même si Kamal se veut aimant et responsable vis-à-vis de Nassim, on ne peut que réprouver son comportement. Indignée par ses agissements, sa mère prend d’ailleurs le parti de le chasser du domicile. L’autre facette de cette marginalité est l’endoctrinement religieux qui récupère les brebis égarées.

Une voie médiane existe, elle est incarnée par la mère qui sait l’importance de l’école pour Nassin, ses camarades de classe et un prêcheur modéré qui tente de contrer l’influence des recruteurs du Djihad. Cela ne suffira pas pourtant à préserver Nassim…

Mais l’objectif du film n’est pas de représenter la loi du milieu. Le dilemme dans lequel se trouvent les protagonistes (quelle voie choisir ?) est finalement mis au second plan, dilué qu’il est dans le maëlstrom de violence qui se déchaîne au Proche-Orient. C’est le second volet du film, celui qui va lui donner un souffle épique et justifier des audaces stylistiques dans un mélange des genres (des moments de chorégraphie alternent avec des scènes de guerre) ; un mélange qui répond à la confusion sur l’identité et la pluralité des belligérants du conflit syrien, comme cette scène ubuesque au cours de laquelle la mère de Nassim se fait expliquer par une soldate kurde comment éviter les barrages mis en place par les nombreuses forces en présence pour atteindre le camp de réfugiés oµ se trouve son fils. Le conflit syrien est un non-sens géostratégique et un non-sens tout court où les volontés s’affrontent et s’auto-annihilent. Le bien et le mal ne sont plus de mise, seul l’instinct de survie compte. Dans le cas de la mère, cet instinct est guidé par l’amour.

Mais comme le montage du film est achronique et à-rebours, les espaces et les temporalités finissent par s’estomper. Au final, seuls les liens familiaux perdurent, ce sont eux qui préservent de l’implosion annoncée. A l’aune de cette vérité, le film devient archétypal, métaphorique, mettant en scène dans un monde en proie au chaos des êtres dont les errements sont imputables à leur attachement filial. Film sur l’empathie, la générosité et sur ses périls, Rebel est à ce titre une ode à la jeunesse prise dans un jeu d’intérêts pervers entre des puissants qui ont rendu la société invivable et se maintiennent au pouvoir en manipulant les minorités pour qu’elles s’opposent entre elles. Nassim et Kamal sont les cibles de cette instrumentalisation qui s’étend bien au-delà de ce que l’on imagine et, à ce titre, ils incarnent une idée de l’être en proie à ses contradictions et dont l’énergie, comme une traînée de poudre, fera son chemin chez les tièdes. Une gestuelle de la jeunesse en images. Violente et gracieuse. A voir !

ninoim
8
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le 4 janv. 2024

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ninoim

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