Rencontre au sommet par StanislasBeck
Un très beau film, original dans la forme et important sur le fond.
Il met en scène un proche collaborateur d'un ministre des finances anglais, expert technocrate, somnambule dans une vie qu'on devine blafarde et pénible, et une jeune fille sortie de nulle part, qui va révéler une lumière enfouie, durant quelques brèves semaines.
La narration est particulièrement fine et sensible, les personnages très attachants, presque timides, mais au fond guidés par une détermination qu'ils ignorent peut-être eux-mêmes posséder.
Le thème qui se révèle peu à peu est en résumé le suivant : chaque année 40 à 50 millions de personnes meurent du fait de la misère, de la faim, du manque de soins, d'eau potable, et autres causes similaires - soit cent mille à cent trente mille morts par jour, qui pourraient et devraient être évitées. Le film évoque plus précisément les 30.000 enfants qui chaque jour, périssent de faim, de soif, de maladie, souvent sous les yeux de leurs parents. Ces chiffres sont évidememnt affreux à connaître et sont donc absolument tabous, masqués et tus par les centaines de chaines de télévision, journaux, magazines d'information et radios de par le monde.
Cette vérité est portée, contre toute attente au coeur d'une réunion de dirigeants du monde, qui pourraient bien, s'ils en décidaient ainsi, orienter les décisions de leur gouvernements pour que ce scandale permanent, horrible, cesse : les ressources disponibles suffisent largement pour nourir et soigner l'ensemble de la population mondiale - pourvu qu'elles soient réparties convenablement.
Mais le choix est fait par une oligarchie de sacrifier cyniquement chaque année ces dizaines de millions d'êtres humains en vue de maintenir les hyper- profits, le pouvoir et le niveau de vie des plus riches. En façade, c'est "le mode de vie", "les intérêts vitaux", "l'équilibre économique", "la croissance" et autres fadaises qui sont mis en avant comme autant de paravents pour protéger le droit au profits insensés des multimiliardaires qui règent sur le monde, et les privilèges de ceux qui les servent (présidents, ministres, journalistes influents, hauts-fonctionnaires et cadres dirigeants de multinationales).
Ce n'est pas à proprement parler un film politique, car ce thème est intégré à la trame des relations qui se nouent entre les deux personnages et qui soutiennent l'intérêt du spectateur. Cependant, on a rarement vu un film aborder aussi clairement ce sujet crucial.
Le scénario nous laisse hélas un peu sur notre faim, par une conclusion plutôt sombre, qu'on ne comprend pourtant pas comme inéluctable. Mais là n'est pas le plus important. Le plus important est que le film fait comprendre, pour ceux qui l'ignoraient, l'une des raisons pour lesquelles une révolution mondiale est nécessaire et inéluctable pour jeter à bas ce système criminel qu'est le capitalisme.
Dans la forme, pas de manièrisme, d'effets spéciaux, ni de sexe, juste ce qu'il faut de moyens artistiques maîtrisés. Un film remarquable, et qui mérite d'être vu et apprécié par un très large public.