Rendez-Vous est une belle réussite de la part d'Ernest Lubitsch. Un film sur lequel je n'avais pas d'immenses attentes malgré sa petite notoriété et les notes plutôt flatteuses sur le site.
Du réalisateur, on retrouve bien évidemment la singularité de son univers cinématographique à travers cette petite histoire fort sympathique à suivre tout au long de cette heure quarante.
D'une construction claire, limpide, tout s'écoule avec finesse et intérêt. Pourtant, il est vrai que l'histoire assez simple d'apparence mais Lubitsch va convertir cela en petite perle tant de nombreux moments sont extrêmement bien mis en scène et réfléchis sur les dialogues. On a donc le droit à de très agréables séquences qui prêtent à sourire voire à quelques petits rires discrets compte tenu de ces nombreux comiques de situation ou quiproquos volontaires. C'est aussi par l'intermédiaire du point de vue que nous offre le réalisateur qu'il nous est permis d'apprécier autant ces moments puisque l'on est au courant de tout ce qui se passe contrairement aux personnages qui sont pris dans les nombreuses incompréhensions que tout ce tissu de relations fait émerger.
Les acteurs tiennent tous leur rôle à merveille et affirment leur personnalité particulière comme il se doit. On retrouve ce côté assez théâtral dans le jeu, plutôt révélateur des films états-uniens des années 30-40 voire 50 (avant l'émergence de l'Actors Studio).
Mais ce film a également le mérite de susciter une réflexion intéressante autour de la question du fantasme de la perfection causée par l'imagination. Finalement, on s'aperçoit que le personnage de Klara idéalise sans cesse un homme qu'elle n'a jamais rencontrée concrètement et se montre déçue de la fausse description physique que lui donne délibérément Alfred à la toute fin du film afin de la confronter à son imagination débridée qui lui joue des tours. Klara tombe finalement amoureuse d'un homme qui paraît plus ordinaire mais qui cache certainement en lui des choses qu'elle ne pouvait soupçonner puisqu'il se révèlera être l'auteur de ses lettres anonymes (quelque chose que le spectateur sait depuis le départ).
Tout ceci n'est pas sans rappeler que l'idéalisation, c'est bien, c'est beau, mais elle peut très rapidement nous faire passer d'un extrême à l'autre. Peut-être que rien ne remplace le charme d'une rencontre impromptue, et l'aura que la personne dégage réellement lorsqu'on la rencontre en vrai, telle qu'elle est concrètement.
Un film que je ne peux que recommander !