Repo ! The Genetic Opera par Wykydtron IV
Un opéra gore et esthétiquement délirant sur fond d'histoire de SF un peu farfelue, par le réalisateur de Saw II, avec un casting aussi intriguant comprenant Paris Hilton et Bill Moseley, pas besoin d'en dire plus, ça m'intéressait.
Me suis dit hier ou avant-hier que j'allais me faire plaisir, et voir ce Repo ! the genetic opera qui me tentait depuis un moment. Les avis sont mitigés, mais je voulais tenter ce cocktail surprenant par moi-même.
C'est un comic book animé qui ouvre le film, résumant le contexte rapidement. On apprend donc sans explications que l'antidouleur addictif nommé Zydrate peut s'extraire à partir de cadavres, et que la repossession d'organes est légalisée. Personnellement, je n'ai pas cherché la logique, me mettant d'emblée en tête que c'était un univers autre.
On n'y croit pas à ce père qui fait 50 ans (même si on veut nous faire croire qu'il en a 40) et qui est super agile en tueur repossesseur, et on comprend pas pourquoi il aurait empoisonné les médicaments de sa fille durant des années, même si on devine que c'est pour la garder auprès d'elle, mais je ne me suis pas arrêté là. Le fait que ce soit une comédie musicale ouverte par une BD doit y être pour quelque chose, mais c'est aussi lié à la théâtralité très présente, qui me fait plus facilement accepter les excès. Et la fin du film confirme que le drame exagéré se veut lié aux tragédies de théâtre.
De plus, puisque certaines scènes s'étendent à cause des chansons, on ne peut pas aller bien loin dans l'histoire. A moins de faire un film qui soit de la durée des vrais opéras à l'ancienne.
Du coup, ce qu'on pourrait reprocher par contre, c'est que les personnages n'aient pas de profondeur et qu'on ne ressente pas leurs émotions, bien qu'on comprenne ce que les scénaristes aient voulu en faire tant on peut les placer dans une grande catégorie (la fille rebelle, le père possessif a vécu un drame terrible et qui n'arrive pas à faire son deuil, etc).
Repo! est surtout un film qui vaut pour son univers, qui fait passer les défauts à côté.
Après la forme du comic book pour lier les différentes trames et effectuer des flashbacks, on trouve des éclairages surréalistes de couleurs variées pour chaque décor, façon Punisher War zone (de la même année), et on a aussi un esprit de cartoon avec des bruitages à la Tex Avery, ou des idées comme la main rentrée dans le corps de quelqu'un pour le faire parler comme une marionnette.
Ca donne le ton, et correspond bien à la dimension comique, presque burlesque, de l'idée de base du film.
L'éclairage ici est important, non seulement pour les couleurs délurées, puisque les ambiances reposent aussi sur la façon dont sont portées les ombres. Ca se remarque surtout à la première apparition de Rotti Largo, quand les cernes sous ses yeux placent ceux-ci dans des ombres triangulaires.
C'est surtout l'atmosphère colorimétrique qui est amusante, en dehors de quoi ce film futuriste ne se démarque pas tellement de ce qui a été vu ailleurs. Il y a juste quelques petites idées, comme les portraits formés d'hologrammes encadrés, ou les feuilles de papier remplacées par des fiches transparentes. C'est pas pratique pour lire, c'est sûrement plus cher à imprimer et moins facile pour écrire dessus, mais c'est classe. Ca me fait penser à ces chaises de Star wars que j'avais vu à l'expo de La Vilette : c'est beau, c'est design, c'est futuriste, mais on doit pas être confortable dedans. Être futuriste ou être à l'aise, il faut choisir, décidément.
Ce qui change pas par rapport à notre époque, et une réalisation précédente de Bousmann, de mon point de vue, c'est le look un peu gothique de l'héroïne, qui peut faire penser au personnage d'Amanda dans Saw 1 et 2. Peut-être que le réalisateur aime ce type de look, je peux comprendre.
En voyant le film, je me suis dit que le tournage devait être complexe, puisqu'il faut que les acteurs chantent juste, ou du moins bougent les lèvres de façon juste pour placer du chant en post-prod, en même temps qu'ils effectuent des actions et prennent jouent sur les bonnes expressions faciales. Je me suis dit aussi que le montage devait être encore plus galère, puisque les mouvements de lèvres à placer à un certain moment pour correspondre au rythme de la chanson réduisent les possibilités concernant les coupes entre deux plans, et ainsi il doit être plus compliqué d'éviter les faux-raccords. Enfin, on accepte quand même les petits défauts, comme quand la tête de Shilo est tournée dans le sens inverse d'un plan à l'autre, et ce n'est pas grave car on n'est pas dans le réalisme, et que des effets de montage clipesques font passer ça.
Il y a aussi le dynamisme, les mouvements de caméras, et parfois le changement rapide de plans et d'emplacement du sujet sur chacun d'eux, qui aident. Et plus les plans se succèdent vite, plus ils varient, quelque fois en se concentrant sur autre chose que le personnage censé chanter, moins les mouvements de lèvres posent problème.
Ce qui permet de ne pas décrocher du film, c'est que la musique est constante, faisant de Repo! un ensemble.
Il n'y a pratiquement que du chant au lieu de dialogues, mais le problème, c'est que les acteurs chantent faux. Il n'y a que le personnage de Blind Mag, qui est décrite comme ayant une voix sublime, qui chante bien, et pour cause elle est jouée par la chanteuse Sarah Brightman. Et pour faire comme si son personnage avait une voix divine, il y a tout simplement un effet de réverbération exacerbé qui différencie son chant de celui des autres, alors que la scène se passe en extérieur.
Les chansons du film ne sont pas non plus déplaisantes. Mais des fois, il y a un truc dans la musique, dans la façon de chanter une réplique, qui donne l'impression que dans un instant ça va décoller pour donner quelque chose de génial, mais en fait non, ça bloque.
Quelques fois seulement, le chant fait passer une émotion, et m'a fait vibrer.
A un moment, il y a un délire avec Joan Jett. Je savais qu'elle était dans le film, mais autrement, à voir l'attitude de l'héroïne et sa tenue dans la scène, j'aurais senti le lien avec la chanteuse des Blackhearts. Elle apparaît bel et bien, mais elle ne joue ni chante rien de spécial, je pense qu'elle était juste là pour agiter sa guitare dans la scène, ce sur quoi de la musique a été ajouté en post-production. Et il n'y a rien de la qualité d'un "Cherry bomb" ou "New Orleans", au contraire le personnage de Shilo chante mal la révolte adolescente, et c'est un peu la te-hon avec Joan Jett à côté.
Enfin bon, ça vaut toujours mieux que Les parapluies de Cherbourg, où le chant est terrible et où la niaiserie m'écoeure.
Ouais, Repo! the genetic opera est imparfait, mais je trouve son délire plaisant. Il y a un brin de violence et de gore (l'arrachage des yeux est surprenant), un univers aux couleurs vivaces, et des chansons pas désagréable à écouter. C'est un film sympathique, que je conseille rien que pour son principe intéressant, car des œuvres pareilles ça ne court pas les rues.
J'ai appris avec le générique de fin que c'était adapté d'une comédie musicale sur scène, déjà créée par Bousman. Le passage au cinéma est assez réussi pour moi, tant le style propre au film ne m'a pas laissé imaginer un instant que ça pouvait avoir été une représentation live avant.