Quoi de neuf, Docteur? Episode I
I- INT-JOUR Un cabinet de médecin. Un gros bonhomme barbu à lunettes semble s'inquiéter de l'état de sa patiente, une petite rouquine visiblement essouflée. DOCTEUR ( sur un ton...
Par
le 15 nov. 2014
57 j'aime
16
C'est avec un peu d'appréhension que j'entrais dans la salle. En même temps très curieux et volontaire je pensais néanmoins tomber sur "un film de filles" qui allait me faire sentir légèrement pas à ma place.
Tututututu j'étais parfaitement à ma place. Place que j'ai mis du temps à quitter d'ailleurs.
Un vent nouveau souffle sur le cinéma français, un vent de liberté, de justesse et de jeunesse qui me redonne espoir en ces temps de cinéma trop politique et provocateur. Mélanie Laurent l'incarne à la perfection et sa deuxième réalisation est une (très) jolie surprise. Même si l'on sent quelques inspirations fortes (ayant récemment vu Crime d'Amour de Corneau et La Vie d'Adèle de Kechiche j'ai pu y retrouver des points communs) et que Laurent peine à trouver une vraie patte, son film est une réussite et se révèle d'une maîtrise et d'une maturité assumée.
L'intrigue se révèle aux premiers abords d'une grande simplicité. En ceci l'histoire d'amitié entre une jeune fille qui a sa bande déjà formée et l'arrivée d'une nouvelle qui vient tout chambouler, n'avait rien de bien original. Mais Mélanie Laurent apporte à cette intrigue un traitement (notamment esthétique) totalement surprenant. Sa caméra, douce et intelligente, filme avec justesse le quotidien de ces lycéens, en se concentrant sur Charlie, une jeune élève un peu timide et austère. En nous plongeant directement dans des scènes de conflit familial, Laurent choisit de nous donner les clefs pour tenter de deviner ce qu'il se passera...
On se laisse emporter, dans cette première partie par cette histoire belle, drôle, touchante, tout sauf pudique. Les personnages évoluent dans des paysages magnifiés par une caméra qui produit des plans sublimes notamment lors des scènes en vacances où s'entrechoquent la douceur de l'image et la beauté des plans (grâce à un subtil jeu de cadres, de reflets, d'ombres et grâce à un jeu d'éclairage intéressant) et la violence insidieuse qui se laisse sous entendre.
Néanmoins on se laisse avoir en se laissant allègrement penser que tout ceci n'est qu'une violence banale, présente dans toute relation amicales.
C'est se tromper que de penser cela. La réalisatrice nous glace le sang par une violence psychologique réaliste et nous paralyse à nos sièges grâce à des scènes d'une tension insoutenable, jusqu'à un final terrifiant. Glaçant. Une claque que l'on se prend en pleine gueule et qui est soulignée par une rupture soudaine de l'illusion cinématographique et par un titre de film qui prend alors un sens totalement ironique et se fait injonction au spectateur : "Voilà, maintenant tu peux respirer."
Ca grince des dents dans la salle, ça retient son souffle ; le soulagement n'en est pas un, la fin n'en est pas une. Respire ne laisse pas indifférent
On regrettera la longueur (à peine perceptible) de certaines scènes et la répétition d'un "ça s'en va et ça revient" du personnage de Sarah. Mais ce défaut est rattrapé par un casting impeccable ; Lou de Laâge et Joséphine Japy sont tout simplement bluffantes (notamment grâce à un final qui déploie tout le spectre de leur jeu). L'accent est mis sur des seconds rôles ultra fouillés, que ce soit des adultes (Isabelle Carré et Claire Keim en tête) ou des jeunes, jolie bande de pote qui touche et montre avec une grande subtilité la jeunesse de cette génération.
Jamais la violence psychologique n'aurait été traitée avec autant de justesse par une réalisatrice en herbe qui a de grands jours devant elle.
Respire ce grand souffle d'air frais dans le cinéma français !
Ajout après second visionnage le 17/05/2016 :
Je rajoute un point, je passe de 8 à 9. Tout simplement parce qu'en sachant le dénouement, et en voyant comment toute l'intrigue se construit autour, on repère tous les signes, tous les parallèles, toute la finesse du jeu, des dialogues et des plans dont Mélanie Laurent a fait preuve. Au second visionnage son film est encore plus percutant, et j'en avais presque oublié à quel point il pouvait être insoutenable par moments. Je me suis pris une seconde claque, encore plus intense, et le clarté du film, sa brillance, m'est apparue plus vivement.
Décidément ce Respire est un petit chef d'oeuvre.
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Les plus belles claques esthétiques, Les meilleurs films de 2014, Les plus belles affiches de films, Les meilleurs films sur l'adolescence et Les meilleurs films français de 2014
Créée
le 21 nov. 2014
Critique lue 481 fois
2 j'aime
2 commentaires
D'autres avis sur Respire
I- INT-JOUR Un cabinet de médecin. Un gros bonhomme barbu à lunettes semble s'inquiéter de l'état de sa patiente, une petite rouquine visiblement essouflée. DOCTEUR ( sur un ton...
Par
le 15 nov. 2014
57 j'aime
16
Un film dans lequel je me suis reconnue, quelques années en arrière, lorsque j'étais au lycée. On rencontre des gens, on les admire, on ne pense plus qu'à eux, plus qu'à être avec eux. Et puis on se...
Par
le 15 nov. 2014
53 j'aime
8
Pour débuter ce film qu’elle voudrait sulfureux, vénéneux tout autant que réparateur, Mélanie Laurent se sert de plans très larges qui filment une ville banale d’un coin de France. En quelques plans,...
Par
le 11 nov. 2014
40 j'aime
13
Du même critique
La Nuit où Laurier Gaudreault s'est réveillé est probablement l'œuvre la plus dure et la plus mure de Xavier Dolan, construite comme une compilation presque étouffante de tous ses thèmes, de toutes...
le 21 févr. 2023
19 j'aime
2
Il y a au départ la petite histoire qui donne son origine cocasse au film : la rencontre, tumultueuse pour le moins, de François Ruffin avec Sarah Saldmann, chroniqueuse sans grande finesse du...
le 2 oct. 2024
18 j'aime
Film emblématique d'une génération, The Blues Brothers n'a pas réussi à me convaincre. En tous cas pas totalement. Certes je n'ai pas passé un mauvais moment, j'ai même ri franchement à certains...
le 29 déc. 2015
18 j'aime