Pour sa première approche du long-métrage après un court de science-fiction, la réalisatrice Française Coralie Fargeat a choisi le rape and revenge, sous-genre du film d’horreur. Revenge est en compétition au Festival de Gérardmer 2018 et a été diffusé en avant-première au Katorza (Nantes) pour l'Absurde Séance jeudi 1er février avant une sortie officielle le 7 du mois. J'y étais.
Comme il en est de coutume dans le petit monde des rape and revenge, le pitch est minimaliste et laisse la part belle aux émotions pour exorciser sans complexe les instincts les plus primaux de l’Homme (et en l’occurrence de la femme).
Un couple est débarqué en hélicoptère aux abords d’une superbe villa perdue en plein désert. Ils sont jeunes, beaux, riches et tout laisse présager des vacances idylliques. La donne change pourtant bien vite, avec l’arrivée de deux amis libidineux du jeune homme, qu’il a jugé bon de convier à une partie de chasse sauvage sans en avertir son amie. La suite de l’histoire est simple à deviner, surtout que le titre du film est aussi basique qu’éloquent.
La première demi-heure évoque une rencontre improbable entre l’ambiance lourde de Swimming Pool de François Ozon et la décadence flashy du Spring Breakers d’Harmony Korine. La tension est immédiate et le malaise s’installe, d’autant que les événements sont diaboliquement plausibles jusqu’après le viol de la jeune femme, laissée pour morte au cours d'une scène terrifiante.
La réalisatrice élargit ensuite la focale de son huit clos, le désert s’invite dans le cadre et le gibier change de camp. Ce désert, aride et lunaire, est sublimé par une photographie léchée et des couleurs fluo où les déclinaisons de jaune et de bleu sont constamment opposées à l’écran. Le parti pris esthétique ne fera pas l’unanimité, mais il a le mérite de renforcer les contrastes et de faire de l’environnement un personnage à part entière, tout aussi impitoyable que les protagonistes humains.
Certaines scènes sont à ce titre assez gores, et malgré des effets spéciaux parfois cheap, bon nombre de spectateurs gesticuleront dans leur fauteuil, détournant le regard à l’occasion de quelques scènes difficilement soutenables. Si le film est revendiqué « féministe » par sa réalisatrice (les personnages masculins sont profondément vils et enclins à tous les vices), nos amis ont paritairement droit à leur lot de souffrance et de sang versé.
L’intensité de la barbarie est habilement contrebalancée par plusieurs séquences comiques qui permettent de décompresser quelques instants et adoucissent l’ensemble. Les acteurs, peu connus, réalisent dans ce contexte une performance tout à fait convaincante.
Globalement, la mise en scène démontre une maîtrise technique qui, pour un premier film rappelons-le, augure des perspectives prometteuses à Coralie Fargeat.
Revenge est une proposition Française impérative pour les amateurs du genre et intéressante pour les curieux avertis.
(critique initialement publiée sur le site Cinérama)