Révolution Zendj par FrankyFockers
6 ans ont passés depuis le chef-d'oeuvre Inland (déjà !) et Tariq Teguia continue de creuser inlassablement de creuser le même sillon, depuis Rome plutôt que vous, et certainement pendant de nombreux films à venir. Pasolini disait qu'un bon cinéaste est celui qui fait toute sa vie le même film, et c'est le cas de Teguia, puisque Révolution Zendj est construit de manière similaire aux deux longs précédents. Il pousse des choses plus loin, d'autres pistes sont tentées, mais la construction reste la même, une ouverture politique, un personnage qui voyage pour tenter d'améliorer le monde, et qui se perd dans une errance atmosphérique (qui à chaque fois me fait aussi penser au cinéma de Rozier), au milieu d'un embryon d'histoire d'amour à peine évoquée... Le film est beaucoup plus godardien que précédemment. Rome était Antonionien, Inland pile-poil entre les deux. On suit deux personnages. Lui c'est un journaliste algérien qui veut aller en Irak sur la trace du peuple Zendj, un peuple d'esclaves noirs qui s'est révolté il y a plus de 10 siècles. Sa rédaction refuse de l'envoyer en Irak, et le cantonnent à Beyrouth. Il ira alors en Irak par ses propres moyens (la traversée du pays constituant la partie atmosphérique du film). Mais à Beyrouth il rencontre l'autre personnage du film. Une jeune femme, grecque, d'origine palestinienne, communiste engagée, qui part au Liban pour apporter de l'argent afin de soutenir les révolutionnaires... Le changement par rapport aux autres films du cinéaste, c'est que la jeune femme finit par rentrer chez elle. Lui, non, la fuite en avant est sans retour possible. comme d'hab. C'est passionnant de voir comment Teguia arrive à rentrer en résonance avec ce qu'il se passe en ce moment dans ces coins du monde, de considérer combien il est un cinéaste politique, et l'un des plus intelligents. Mais que son cinéma est avant tout poétique, enfin les deux à la fois, de la poésie et de la politique, ça pourrait être une définition de ce que doit être l'art cinématographique. Si j'ai adoré le film, je crois tout de même que c'est celui des trois de l'auteur qui me marque le moins (enfin tout est relatif à ce niveau) mais tout simplement parce que l'effet de surprise n'est plus là, parce que je m'attendais à voir cela. Alors que ma découverte d'Inland fut un choc sans précédent. Niveau B.O.F. c'est tout aussi excellent. Alors que Inland utilisait du Fennesz, du Alva Noto, du Taylor Deupree (de mémoire), Révolution Zendj, de par son côté politique, militant, propose une musique plus engagée, directe, et on y entend Swans, Ash Ra Temple, Godspeed, Silver Mount Zion ainsi qu'un formidable morceau de Nico...