Rio Bravo est la réponse de Hawks et Wayne à High Noon (1952) dont ils n’aimaient pas le personnage principal. Le shérif Chance est ici la parfaite antithèse de Kane dans High Noon. Alors que dans ce dernier, le shérif cherchait désespérément de l’aide auprès de la population et manifestait sa peur, dans Rio Bravo, à l'intérieur d'une situation hyper tendue qui s’étale sur plusieurs jours, le shérif ne manifeste aucune peur, et refuse l’aide des civils pour ne pas les mettre en danger. Alors que dans High Noon les civils se défaussent, ici plusieurs d’entre eux viennent en aide au shérif malgré ses refus. Le climat est donc radicalement différent.
Rio Bravo est intéressant par ce climat de tension traversé par la flegme inébranlable du shérif (Wayne) et par les relations qu'il entretient avec son entourage. Relations de bienveillance bourrue, d’amitié forte et solide, d’estime dite à demi mots. Cet entourage est varié au possible : Stumpy, un éclopé volubile qui garde la prison ; Dude, un associé dépressif qui noie son chagrin d’amour depuis deux ans dans la boisson, un couple de mexicains extravertis ; Colorado, un jeune garçon qui a la tête froide et enfin « feathers » une joueuse de poker également volubile et un brin compliquée suivant ma sensibilité… C’est le personnage avec lequel j’ai le plus de mal…
Rio Bravo installe sa tension autour de l’attente longue de 6 jours du shérif fédéral. Ce dernier doit venir chercher un prisonnier dangereux à garder, car son frère tout puissant dans la région est prêt à tout pour le libérer et a les moyens financiers pour payer des hommes capables de le faire… les jours passent, la tension augmente, les accidents se succèdent jusqu’à la formidable bataille finale très bien menée et filmée. Cette tension est entretenue par l’air mexicain « Deguello » dont les notes se répandent dans la rue, musique emblématique porteuse d’un message : un appel à ne faire aucun quartier. Musique destinée à appeler à la lutte contre le shérif et qui finalement aura l’effet contraire en redonnant ses forces à Dude au moment où il allait lâcher en sombrant dans sa dépression.
Rio Bravo nous offre également un agréable intermède musical de country au sein de la prison, donnant occasion aux deux acteurs musiciens – Dean Martin et Ricky Nelson – de laisser libre cours à leur talent.
Rio Bravo est un western palpitant à suivre dans lequel John Wayne habite son personnage avec aisance. Il est accompagné d’une ribambelles de personnages secondaires, tous intéressants par leur évolution. A travers cette situation éprouvante ils vont chacun retrouver leur dignité. Au final, j’aime autant Rio Bravo que High Noon aussi intéressants l’un que l’autre avec un traitement différent de l’attitude d’un shérif en situation dangereuse.