Ce film a une moyenne plutôt peu élevée, mais rarement des notes en-dessous de 7, c'est encourageant. C'est un film que j'ai vu très jeune, en 1975 j'étais ado, et ça m'avait évidemment marqué. Le message philosophique m'était passé au-dessus de la tête parce qu'à cette époque, je n'étais pas tellement capable d'analyser quoi que ce soit, j'allais au ciné pour me détendre et pour le simple plaisir du premier degré. Aujourd'hui, c'est différent, je l'ai revu il y a quelques années en VHS, mais pas récemment, ce n'est pas bien grave car ce film est tellement marquant pour un gars de ma génération que je m'en souviens parfaitement comme si j'étais encore en 1975.
Fable d'anticipation captivante, Rollerball se situe dans la grande tradition des films de SF qui donnent de l'avenir une vision pessimiste, comme dans Soleil vert sorti à la même époque. Et c'est effectivement une vision très pessimiste de l'humanité, où l'homme expurgé de ses pulsions, est devenu une sorte de mouton qui écoute une autorité et un pouvoir dictatorial ; on est au 21ème siècle, la violence a été bannie du monde civilisé, tandis qu'un nouveau sport, le rollerball, fait rage, mais la popularité de certains joueurs fait craindre aux dirigeants qu'ils ne deviennent trop puissants. Les Terriens n'ont plus d'autre préoccupation que leurs loisirs, quel monde idéal ! Le rollerball est un combiné de basket et de hockey, capable de canaliser la seule violence tolérée par les autorités.
Tout le talent de Norman Jewison est d'inviter le spectateur à une passionnante réflexion philosophique sans qu'elle soit trop démonstrative, car le point fort du film reste bien sûr les extraordinaires séquences de ce jeu meurtrier filmé par une caméra sans concession, dans des scènes d'une brutalité rarement montrée à cette époque à l'écran, et surtout de façon aussi réaliste, je me souviens que ça avait soulevé des débats à ce sujet. C'était aussi le reflet d'un certain cinéma de science-fiction qui voulait rompre avec le vieux ciné des années 50 et 60 à tendance plus débonnaire ou effrayante, ici la frayeur venait de l'action traitée avec une violence excessive pour mieux faire réfléchir le spectateur. On ramenait le public à ses bas instincts en le contentant avec des jeux du cirque modernes comme les gladiateurs contentaient le goût du sang des Romains de l'Antiquité, c'est une étonnante parabole.
On y remarquait encore une fois après le triomphe du Parrain, James Caan qui crevait l'écran en imposant un physique carré et une image d'acteur buriné. Un film à voir.