Rollerball est un classique de la dystopie au cinéma qui n'a pas pris une ride dans ses thèmes, et juste quelques rides dans sa réalisation ne le rendant que plus sympathique.
Bien sûr, le spectateur moderne sera surpris par le manque de rythme totalement voulu du film dans ses scènes se déroulant en dehors du jeu. C'est évidemment une volonté de la part du film de créer un contraste qui tient presque du grand écart entre la violence et l'action permanente du jeu de massacre qu'est le rollerball, et cette société aseptisée qui a vu naitre le jeu comme une espèce de dernier défouloir.
Rollerball est intéressant à plus d'un titre, car même s'il y a un relent de critique du communisme assez évidente dans son chef: les grandes corporations uniques par secteur se servant du jeu pour démonter l'inutilité de l'effort individuel, et sont gênées par la longévité et le statut d'icône qu'a acquis Jonathan E au fil du temps(magistralement interprété par James Caan), allant à l'encontre du message qu'ils veulent propager; le film démontre également les similitudes que pourraient revêtir une société ultralibérale poussée à l'excès avec le communisme, renvoyant les deux systèmes à ce qu'ils sont au final: les deux faces d'une même pièce, la centralisation des pouvoirs aux mains de gens toujours moins nombreux étant clairement une caractéristique des deux systèmes.
Le film ne caractérise pas le pouvoir par un grand état tout puissant comme il serait plus facile de le faire pour critiquer les tenants de l'idéologie communiste, mais dans un retournement brillant, caractérise cette société par six grandes entreprises qui ont fini par tout absorber, arrivant ainsi exactement au même résultat.
Combien de grandes entreprises contrôlent l'essentiel du marché dans chaque secteur à l'heure actuelle? Et qu'elle autre tendance possible que leur fusion progressive pour devenir des méga corporations dirigeant des pans entiers de l'économie? Il n'est pas très étonnant qu'un auteur comme Gibson ait déclaré, et je paraphrase, ne trouvant plus la citation exacte, qu'écrire du cyberpunk à l'heure actuelle revenait à écrire dans la veine réaliste.
Le film possède encore quelques moments réjouissants de cynisme et d'ironie, comme cette visite de "Zero", l'ordinateur qui sait tout à Genève, ou le contraste entre les parties de rollerball pleine d'action, et pourtant vide de sens qui renvoie à la position du spectateur en ce que nous avons le réflexe de trouver ces scènes plus enthousiasmantes que les parties de questionnement de Jonathan E sur la vacuité de sa vie et de la société dans laquelle il vit. Ce questionnement ne changera rien, et il ne sera d'ailleurs capable d'exprimer sa révolte qu'au sein du jeu, la place qui lui a été allouée, et dont il ne peut véritablement sortir.
Tout les chemins mènent à la société du contrôle semble être ce que tente de conclure de manière assez noire le film de Norman Jewison. Et lorsqu'il nous arrive d'avoir le choix entre le confort et la sécurité, même factice, au dépend de la liberté, nous choisirons systématiquement la société du contrôle.