Polanski : l'homme aux plusieurs vies.
Quand l'un des plus grands réalisateurs contemporains se raconte auprès de l'un de ses amis en esquivant aucun sujet, cela un donne un moment à la fois passionnant et émouvant, un gros plan sur une vie exceptionnellement remplie, en passant à plusieurs reprises de la gloire au lynchage médiatique.
Il faut d'abord recontextualiser l'interview, Roman Polanski est alors en plein doute après le retour de l'affaire de viol sur une mineure, en l'occurrence Samantha Geimer.
Une affaire qui avait fait scandale fin des années 70 et qui s'était conclue par la fuite de Polanski, sous le coup d'un mandat d'arrêt, hors des Etats-Unis.
Mais l'affaire ne s'arrête pas là et l'illustre réalisateur d'origine polonaise se retrouve de nouveau mêler à cette sombre histoire en étant arrêté à Zurich, passant 10 semaines derrière les barreaux et contraint par la suite à une assignation à résidence dans son chalet à Gstaad ( certes il y a pire comme endroit), lieu de l'entretien présenté ici.
Il sera soutenu par de nombreuses personnalités tout univers confondus, ce qu'il a peut être finalement plus desservi qu'autre chose.
Polanski s'y confie comme rarement, abordant les moments les plus troubles de sa vie, et tout particulièrement sa jeunesse douloureuse en Pologne pendant l'occupation allemande, le thème principal de son plus célèbre film : Le Pianiste.
Les concordances se font rapidement et on se rend compte très vite à quel point ce film peut être un considéré comme auto-biographique tant Roman s'inspire de son passé, certaines scènes étant la représentation à l'écran de ce qu'il a réellement vécu.
C'est sans nul doute le passage le plus émouvant de tout le documentaire, ne pouvant que compatir devant ses séquelles encore bien présentes.
L'intervieweur mais également son confident de longue date n'esquive pas non plus l'autre grand drame de sa vie : l'assassinat de sa femme par Charles Manson à LA, l'émotion dans sa voix est palpable à chaque phrase prononcée et surtout cela reflète bien sa souffrance, décuplée lorsque les médias ont fait circuler de fausses rumeurs concernant ce meurtre.
Seul petit bémol, dans ce genre d'entretien très intimiste, je trouve qu'il est préférable que l'intervieweur n'ait pas de lien privilégié avec la personne interrogée, par souci évident d'objectivité et là ce n'est pas le cas étant donné qu'on a affaire à un ami proche de la star.
L'argument contraire serait de dire que Polanski n'aurait jamais accepté de se livrer autant s'il n'était pas avec quelqu'un de confiance, ce qui semble logique vu la personnalité à fleur de peau du réalisateur.
La justesse et l'émotion sont présentes tout au long et nous permettent de mieux comprendre cet auteur faisant quasiment l'unanimité auprès des cinéphiles, un homme sensible à la vie tumultueuse qui laissera derrière lui plusieurs chefs-d'oeuvres comme Rosemary's Baby, Chinatown et comme il le dit lui même, celui dont il est le plus fier et c'est compréhensible : Le Pianiste.