RRR ou Ratham Ranam Roudhiram que l’on comprendra mieux en anglais ! Rise Roar Revolt est un film d’action indien fictionnel mettant en scène deux grandes figures historiques qui ont lutté pour l’indépendance indienne : Komaram Bheem et Rama Raju. Ces deux révolutionnaires ne se sont jamais rencontrés, mais le réalisateur a voulu relier leur histoire en plaçant l’intrigue en 1920, au temps de la présence coloniale Britannique en Inde et à une époque durant laquelle nous ne savons pas grand chose de la vie des deux hommes. Il a ainsi écrit une histoire riche en rebondissements dans laquelle ils se lient d’amitié.
RRR est un blockbuster qui verse dans la démesure : les effets de manche s’enchaînent les uns après les autres, les scènes d’actions sont totalement irréalistes, les ralentis sont nombreux, le rythme est trépident, les acteurs surjouent comme c’est souvent le cas dans les films indiens, et les personnages sont caricaturaux. Mais tout cela est voulu et maîtrisé. Si on accepte ces codes on peut alors vivre un véritablement moment de dépaysement !
Bien sûr les Britanniques n’ont pas le beau rôle… Sauf exception, ils sont méchants, cruels, idiots, superficiels, méprisants, grossiers, ridicules. Une scène est particulièrement emblématique, celle de la réception dans la propriété coloniale Britannique. Un britannique humilie Bheem devant tout le monde et interroge : que savent ces indigènes sur la finesse et l’art, que savent-ils du tango, du swing, du flamenco. Mais Bheem et Raju reprennent le dessus : ils ne savent rien de ces danses mais que savent les anglais du Desi Naach ? Et ils se livrent avec leur provocateur à un duel de danse dans lequel ils font démonstration de cette danse qui requiert énergie, endurance, vitalité, rythme. Une séquence survitaminée dans laquelle bien sûr les indiens sont vainqueurs et reprennent le dessus sur celui qui les a humiliés !
Les scènes d’actions sont totalement irréalistes mais aussi spectaculaires ! On y prend plaisir même si l’utilisation du fond vert est criant… Le sauvetage du gamin pris dans les flammes qui va être l’occasion pour Bheem et Raju de se rencontrer et de lier amitié, les scènes de bataille et tout particulièrement la scène d’évasion où Bheem porte Raju sur ses épaules. Ils ne font plus qu’un, c‘est magnifique. Bheem forme les jambes et Raju forme les bras qu’il a travaillés à muscler durant sa détention. Cela donne lieu à une séquence absolument surréaliste ! Il est impossible de goûter cette scène sans mettre de côté son esprit cartésien ! Dans ces scènes de combat, il n’y a aucune limite, tout est permis : balancer des motos, lancer des hordes d’animaux sauvages sur l’ennemi, tirer une grenade avec une flèche, ce sont des scènes grandioses !
Il y aurait de nombreuses séquences et de nombreux points à souligner, je termine par la scène d’apothéose qui montre Bheem et Raju luttant dans la forêt. Ils sont dans leur élément. Séquence qui fait référence, notamment à travers les paroles de la chanson qui accompagne l’action, à la forme sous laquelle ils sont restés dans la mémoire indienne.
Rama, le descendant de la lignée de Raghu est le plus grand de tous les guerriers et son charme en tant qu’empereur est inégalé. Son arc est aussi puissant que celui de Shiva dont le son effraie ses ennemis quand ils s’apprêtent à mourir.
Le ciel s’assombrit de peur alors que Beehma le lion du clan Komuram saute pour attaquer ses ennemis, Beehma le lion du clan Komuram !
Ces paroles réunissent dans un même chant les deux personnages :
- Sitarama Raju qui est ici rattaché au personnage légendaire Raghu, empereur indien qui a accompli de grands exploits. Sitarama Raju se bat dans cette séquence avec un arc et des flèches face aux armes à feu des Britanniques. C’est ainsi qu’il est représenté de nos jours. Le personnage historique a commencé sa guérilla avec ces armes de fortune avant de réussir à s’emparer d’armes à feu.
- Bheem est désigné comme un lion. Après sa mort il a été déifié et représenté sous le symbole de cet animal. Des tribus Telougou lui vouent un culte.
Cette séquence dans son esthétique adopte un style irréaliste encore plus marqué car nous sommes là face à des personnages de légende, tel que l’imaginaire indien se les représente.
Si le film n’a rien d’historique, il s’enracine pourtant dans une situation historique précise, celle de la présence coloniale, celle de l’oppression des indigènes des tribus de la forêt qui appartiennent à la caste des « intouchables ». Les mots : eau, forêt et terre qui sont évoqués à diverses reprises dans le film se réfèrent à un slogan attribué à Bheem et repris par les tribus comme un appel à se battre pour leurs droits à vivre dans et de la forêt.
L’esthétique de RRR rappelle avec force celle de La légende de Baahubali 1e et 2e partie, films également réalisés par S. S. Rajamouli. Un réalisateur qui ne lésine pas sur les effets spéciaux, ce qu’on peut ne pas apprécier, mais qui s’amuse visiblement à verser dans la démesure et qui nous offre une superbe photographie, un régal pour les yeux.