En général, j'aime bien les films qui associent un type mûr et une guitare. Le gars joue généralement honnêtement, comme acteur et comme gratteux. Voilà donc comment mon séant a atterri devant celui-ci. J'aime bien Billy Crudup, suffisamment discret pour atterrir sur la 2ème ligne dans la distribution de la fiche technique, alors qu'il tient le rôle principal, c'est dire s'il est recommandable. Lawrence Fishburne, qui a un tout petit rôle, lui passe carrément sous le nez. C'est qu'en fait, les vrais héros du film sont les jeunes. Le fils disparu du héros et un musicien trop timide pour promouvoir ses propres compositions. Un malentendu sera le lien entre eux et fera tout le sel de cette drôle d'histoire, qui pourrait être traitée comme une tragédie et se contente d'un mode mélancolique en sourdine. Plutôt bienvenu, d'autant qu'à l'origine de la dégringolade du quinqua, il y a une énième tuerie dans un établissement scolaire américain. Tragédie qui aurait pu phagocyter tout le scénario et qui se contente de naviguer en périphérie, assez sainement serais-je tentée d'ajouter, car le père privé de son fils unique ne se noie pas dans ses larmes, leur préfère l'alcool, et se donne le temps d'encaisser la tuile qui lui arrive en se retirant de tout ce qui faisait sa vie de père. Du monde des affaires il passe à celui du bâtiment, pour se vider la tête. Et la musique dans tout ça, me direz-vous ? Eh bien elle surgit avec les chansons composées par son garçon, qui vont donner à tous l'occasion de plonger dans une jeune tête souffrante. Le rêve américain n'a fonctionné que pour ses parents, nantis, mais lui n'a jamais trouvé sa véritable place. Je ne peux guère en dire davantage, sauf que cette blessure se dévoile très progressivement, de façon assez maligne, ce qui tient à distance tout pathos exagéré et réserve quelques belles surprises (et d'autres moins réussies, qu'on anticipe depuis le début). Mais bon, voilà, une fiction honnête, portée par une pop honnête aussi, bien interprétées (la fiction et la pop), et qui en plus pousse à s'interroger sur les limites du modèle occidental tout en proposant une lecture un peu différente du deuil. Pas si mal, donc.