Un homme trop sage
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Il n’y a pas énormément de films qui nous montrent ce qu’on a jamais vu, qui nous apprenne ce que l’on a jamais appris, et qui surtout le font à dessein, en étant toujours juste.
Sage-Homme en fait partie, en s’emparant magnifiquement du sujet de la maternité, et du rapport des hommes à celle-ci. Pas seulement des hommes en tant que pères, mais de façon plus générale, et à travers l’expérience de Léopold, apprenti sage-femme bien malgré lui.
Comme beaucoup, je pense, je ne savais pas que le « femme » du terme « sage-femme » ne désignait pas le médecin, mais bien la femme dont on s’occupe, celle qui accouche. Et que l’on peut donc dire « le/un sage-femme ». Le film de Jennifer Delvodère – dont je ne connaissais rien auparavant (et qui n’avait pas sorti grand chose, quatre petits films, depuis le début de sa carrière en 1997) – joue avec subtilité de cette ignorance, la notre et celle de Léopold, au début du film. On sent bien, dans le chuchotement honteux avec lequel il annonce son choix par défaut à l’issue du concours de médecine, qu’il n’est pas trop à l’aise avec sa nouvelle dénomination.
Et puis Léopold, superbement interprété par Melvin Boomer, apprend, découvre, est surpris en même temps que nous. Comme nous, sans doute, il n’avait jamais vu de ma vie un accouchement dans le détail, en gros plan, avec le sang, le liquide amniotique et le placenta. S’autorisant à briser la pudeur que l’on nous avait toujours imposée sur le sujet, Sage-Homme nous permet d’appréhender ce moment dans toute entièrement, dans sa joie, dans sa douleur, dans ses complications aussi parfois.
Évidemment c’est sa rencontre avec Nathalie (Karine Viard, excellente en sage-femme qui a roulé sa bosse et qui cache ses problèmes personnels sous un caractère enjoué et à toute épreuve) qui va tout changer. Le duo fonctionne bien, très bien même, et c’est sûrement la grande force de ce film, qui a réussi le pari de se forger un style, de se donner un ton. C’est elle qui va le forcer (gentiment) à porter une blouse rose et pas bleue, puisque c’est la règle. Elle qui va lui donner le goût de ce métier magnifique – l’un des seuls en médecine « où l’on a plus de bonnes nouvelles que de mauvaises », comme le dira la future copine de Léopold. C’est lui qui le lui rendra bien, en devenant rapidement un apprenti incroyablement doué, et surtout une sorte d’ami, ce qui semble en réalité manquer cruellement à Nathalie – ça on le voit quand les choses commencent à mal tourner.
Souvent drôle, toujours juste, seule la toute fin n’est pas tout à fait à la hauteur du reste, puisqu’il est toujours compliqué et risqué de conclure correctement une œuvre réussie, de la quitter, d’en sortir dignement.
Sage-Homme est un (très) bon film, qui vient directement occuper la place du meilleur film traitant de la maternité et de l’accouchement qu’il m’ait été donné de voir (je n’en ai sûrement que très peu vu). Sans se renier, en restant avant tout une comédie, sans non plus entrer dans aucun excès, bref en sonnant vrai, il y a là un film qui nous éduque, au meilleur sens du terme, qui nous cultive et nous rend plus sages.
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