Delépine/Kervern, Kervern/Delépine. Un duo qui sait étonner, rire, émouvoir, chambouler. Authentique et absurde. Ce duo de scénaristes-réalisateurs est l’un des plus ambitieux en la matière et signe des films d’une grande cohérence.
Nous les retrouvons avec un road trip beaujolais. Tandis que Jean exhibe son taureau au Salon de l'agriculture, son fils Bruno parcourt les stands lors d'une "route des vins" toute personnelle. Depuis la mort de la femme de Jean, le courant ne passe plus entre les deux hommes. Pour recoller les morceaux, Jean embarque son fils dans une véritable tournée viticole. Pendant une semaine, ils seront conduits par Mike, un jeune chauffeur de taxi énigmatique.
Le folklore de l’œuvre permet de capter les sentiments de personnages réalistes. Et en ça, l’absurde devant la caméra de Delépine/Kervern prend tout son sens en définissant la mélancolie flottante des personnages. Leurs personnages d'habitude ont la singularité de n’absolument pas rentrer dans des clichés. Ici, interprétés par Depardieu et Poelvoorde deux muses du duo, Jean et Bruno sont moins surprenants et pas du tout spontanés. Ils sont pourtant toujours emmenés dans des situations cocasses assez drôles, une marque de fabrique dans les road trip du duo. Le protagoniste de Mammuth rentre dans cette catégorie, un personnage haut (ou plutôt bas) en couleur tiré d’un film que j’aie vraiment apprécié.
A l’inverse, ce film-là m’a laissé un certain vide et ne m’a pas vraiment transporté. Un énorme problème de rythme existe. De leur côté, les acteurs, malgré leurs qualités certaines, sont en grande partie en roue libre avec des incarnations laissant de marbre. Dans Mammuth, l’enjeu était là, correspondant à une quête des trimestres d’un citoyen lambda au chômage. Le personnage était moins lisse, plus abrupt que nos amateurs de vins. Le symbole avec la moto éponyme sacralisait le film. Dans Saint Amour, l’histoire pleine de promesse accroche certes notre intention mais finit par lasser. La viticulture est à peine traitée et le vin n'est qu'une source d'alcool ce qui est dommage. Le dénouement quelque peu niais et attendu se laisse entrevoir dès la moitié du film. Vincent Lacoste de par sa nouveauté dans la bande n’apporte pas de fraîcheur. La musique de Tellier n'est pas non plus transcendantale. Rien de bien mémorable.