Parce que même si les fantômes ne font pas peur, il n'est pas toujours bon qu'ils nous suivent. 

Un film qui vient nous chercher à des endroits intimes et propres à chacun. Peu importe l’âge, peu importe si tu étais venu en pensant que ça serait une petite comédie romantique parfaite pour sa date de sortie le jour de la Saint-Valentin. Peu importe si tes motivations étaient uniquement Paul Mescal « parce qu’il était quand même vraiment bien dans Normal People » ou parce que « Oh ! c’est l’acteur de Fleebag ». Peu importe si tu ne sais pas si tu as aimé quand tu sors de la salle. Il semblerait que c’est cela, être bousculé.  Ce film marque comme du cyanotype. Des fleurs dans de l’encre. 


De l'angoisse, à ce qu'on n'a pas dit, en passant par ce que tu ne peux dire qu'à lui. Avec une bande originale nuancée qui vient poser un voile sur les scènes qu'elle accompagne, on nous attrape par le corps. Seul dans une souffrance, il se rassure et s'ancre tant qu'il peut dans une vie construite en filigrane. Les larmes coulent chez les personnes à ma gauche et pas à ma droite, et là où je pensais qu'uniquement un nœud se placerait potentiellement dans ma gorge, mes yeux se sont mis à pleuvoir. Parce que visuellement c'est d'une beauté pure et réelle. Parce que ce n'est pas édulcoré et que ça fait mal. Parce que ça vient nous piquer autant dans l'empathie que dans l'identification. Sans jamais nous connaître appuie sur des interrupteurs surprenants et dissout la frontière entre l'histoire qu'on nous raconte et celle qu'on a l'impression de vivre. Deux acteurs magistraux qui donnent vie à tout. On voit des larmes, des peurs, du sperme, de la mort, de la confusion. Quelqu’un d’infiniment seul. C'est écrit, avec une douceur brutale, et surligné avec des néons de couleurs aveuglants.  L'amour nous est craché dessus et ça fait autant de bien que de peine. Une envie que les points finaux n'existent pas. Une envie de protéger quelqu'un là où on ne saurait se protéger soi-même. C'est trop calme et trop bruyant. C'est sublime et grandiose. Être seul est terrifiant.  Histoire d’amour créée ou bien réelle, la douleur lui agrippe les jambes et nous colle, nous spectateur, au fond du siège. Impossible de bouger, le velours rouge du fauteuil fait maintenant partie intégrante de notre peau. Les yeux ne clignent plus, trop enfoncés dans l’écran même si les vagues rendent pourtant la vision trouble. Les poumons se ferment, l’air n’entre plus.

Tout le monde se crée ses propres fantômes, ça aide à être moins seul.e dans le cœur, bien que ça ne contre pas le manque de présence matériel autour, et là où ces entités font des aplats sur nos plaies, la chose étrange qu’on appelle réalité, vient y enfoncer des épines.

À la fois envie de le revoir vite pour toutes ces émotions qu’il réveille et au même niveau l’envie de ne jamais le revoir.  Un film pour les vivants. Un film pour les fantômes. Une porte fermée et le silence trop calme à l’intérieur. C’est okay de mettre des pansements sur des membres amputés. C’est okay.

Créée

le 14 mars 2024

Critique lue 37 fois

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