Sandrine Bonnaire crève l'écran. On a l'impression de vivre une tragédie grecque intemporelle, avec une Mona fière et sauvage, à la recherche d'un idéal qu'elle pourrait atteindre si la réalité était moins crue ... elle se fait violer et pourtant elle continue sa quête comme si de rien n'était, c'est un personnage vrai et authentique, peut-on vraiment lui donner tort d'aller jusqu'au bout ?
Les caméras par moments enlaidissent tout, rendant tout volontairement brumeux, puis subtilement une ruelle, une partie du décor devient limpide, un intérieur nous dévoile l'âme des gens qui y habitent comme pour mieux marquer la différence entre Mona et les autres protagonistes du film.
Les paysages, sublimés par un cadrage et un rythme précis et fin, nous font rentrer en empathie avec Mona, comme si nous étions ses propres yeux par moments ... alors qu'un habile montage fait qu'à d'autres moments nous sommes comme ces inspecteurs de police, en quête de la vérité de cette mort tragique.
C'est volontairement mal cadré, symboliquement elle se retrouve souvent dans les angles et non au centre de l'image ... soit rejetée, soit voulant fuir un cadre trop rigide.
C'est monté de manière volontairement anarchique pour semer la confusion, on ne sait pas au début du film que penser : s'agit-il d'un meurtre ou d'une mort naturelle ?
L'histoire pose une réflexion philosophique sur le sens de l'existence. Le scénario est tragique. Les personnages sont attachants, même dans leurs bribes de conversation, on rentre en empathie avec la plupart d'entre eux. C'est à regarder avec son coeur et ses tripes.
Cela semble être de l'amateurisme. La prise de son semble affreuse. Mais tout est en fait fait de main de maître, un joyau en somme que je m'en vais déposer de suite dans son écrin ...
Je découvre les films d'Agnès Varda. "Le Bonheur" m'avait déjà d'emblée conquis, celui-çi me donne envie de poursuivre sa filmographie. Il y a chez elle cette volonté esthétique et humaine entremêlées qui me séduisent au plus haut point.