⚠️ Une maintenance est prévue ce Mercredi 4 décembre de 9h00 à 13h. Le site sera inacessible pendant cette période.

Santosh
7
Santosh

Film de Sandhya Suri (2024)

Le cinéma féminin indien a brillé à Cannes cette année. Avant la sortie du primé All we imagine as light de Payal Kapadia en octobre, Santosh de Sandhya Suri, présenté dans la Section Un certain Regard, partage un certain nombre de similitudes, notamment dans le fait que les deux cinéastes viennent du documentaire. Si la première offrira un regard assez poétique et lumineux sur le parcours de plusieurs femmes, Suri propose une cartographie bien plus sombre des réalités du pays.


Le récit suit le parcours d’une femme qui hérite, comme la loi le permet, du poste de son mari à la mort de ce dernier, et se retrouve propulsée policière du jour au lendemain. Un parcours initiatique en trois temps, qui n’épargne pas quelques longueurs dans son exposition, mais se rive au point de vue de l’apprentie, d’abord en observation sur les injustices sociales entre castes ou la misogynie généralisée. La seconde période, bien plus intéressante, ébauche un récit d’émancipation durant lequel Santosh se rapproche de sa supérieure Sharma, qui reconnaît en elle une alliée et une disciple, capable d’équilibrer les forces au sein d’une police laissant évidemment peu de place aux femmes.


L’approche naturaliste – lumières naturelles désaturées, caméra à l’épaule, absence de musique extradiégétique – reprend tous les codes du documentaire, mis un temps de côté par les possibilités presque fantasmatiques d’une fiction où la justice serait rendue par la sensibilité et l’humanisme de femmes enfin propulsée à des postes à responsabilité.


C’est là que le film prend véritablement son envol : la figure d’abord charismatique de Sharma s’enrichit progressivement d’ambiguïtés croissantes, et contribue à un tableau sans fard du rapport au pouvoir, à la loi et à la justice dans un milieu gangrené par la corruption. L’idée forte consiste à ne jamais basculer dans le manichéisme, la figure du mentor restant toujours dans une posture qui n’abandonne pas certains idéaux (de justice, de féminisme) mais les noie dans une compromission insoutenable. Le code du polar, largement convoqué, reste toujours en sourdine dans une enquête finalement linéaire, une course poursuite d’une très belle tension, et dénuée à dessein de tout paroxysme : car dans cette illusoire quête de la vérité, c’est surtout le terrible immobilisme de l’injustice qui sera mis au jour.

Sergent_Pepper
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Les meilleurs films sur la corruption, police, Féminisme, Vu en 2024 et Inde

Créée

le 18 juil. 2024

Critique lue 1.9K fois

46 j'aime

Sergent_Pepper

Écrit par

Critique lue 1.9K fois

46

D'autres avis sur Santosh

Santosh
Cinephile-doux
8

Les intouchables et les autres

Il y a deux sortes d'intouchables en Inde : ceux que personne ne veut toucher, car de trop basse extraction, et ceux qu'il est impossible d'atteindre, formant une "élite." Sous couvert de polar,...

le 21 juil. 2024

21 j'aime

4

Santosh
EricDebarnot
7

La femme est l’avenir de l’Inde…

Une fois de plus, ne croyez pas ce qu’on vous dit pour vous attirer dans les salles obscures bien vides cette année : Santosh n’a rien d’un thriller. Certes, il s’agit d’une enquête policière menée...

le 19 juil. 2024

15 j'aime

Santosh
Azur-Uno
8

Intouchables contre Intouchables

Pour son tout premier long-métrage, la réalisatrice Indienne Sandhya Suri, habituée jusque là au documentaire et au court métrage, nous gratifie d'un film étonnant et passionnant, un vrai polar noir...

le 15 août 2024

9 j'aime

4

Du même critique

Lucy
Sergent_Pepper
1

Les arcanes du blockbuster, chapitre 12.

Cantine d’EuropaCorp, dans la file le long du buffet à volonté. Et donc, il prend sa bagnole, se venge et les descend tous. - D’accord, Luc. Je lance la production. On a de toute façon l’accord...

le 6 déc. 2014

774 j'aime

107

Once Upon a Time... in Hollywood
Sergent_Pepper
9

To leave and try in L.A.

Il y a là un savoureux paradoxe : le film le plus attendu de l’année, pierre angulaire de la production 2019 et climax du dernier Festival de Cannes, est un chant nostalgique d’une singulière...

le 14 août 2019

715 j'aime

55

Her
Sergent_Pepper
8

Vestiges de l’amour

La lumière qui baigne la majorité des plans de Her est rassurante. Les intérieurs sont clairs, les dégagements spacieux. Les écrans vastes et discrets, intégrés dans un mobilier pastel. Plus de...

le 30 mars 2014

618 j'aime

53