Résumé
En héritant du poste de policier de son mari décédé, Santosh va devoir faire face à plusieurs niveaux d'injustices et de violences. Les sujets abordés sont intéressants, et le scénario pertinent. On pourra cependant regretter le manque d'explications quant au parcours de cette femme.
Détails (et quelques spoilers)
Car si le passage de la vie de Santosh qui nous est conté est tout à fait intéressant, nous ne saurons jamais pourquoi cette femme parait plus sensible que d'autres aux injustices qu'elle perçoit. Bien qu'elle ne soit pas une figure héroïque, elle est relativement valorisée dans son attitude, notamment si on la compare à ses collègues de la police.
Le fait de parler du racisme interreligieux et du mépris pour les castes inférieures est une grande qualité du film, mais on ne comprend pas vraiment pourquoi Santosh ne partage pas, ou du moins pas autant que les autres, cette haine de l'autre. Par ailleurs, la manière dont les fonctionnaires de police sont sanctionnés est un peu confuse. Car on parle de suspension et de mutation à deux reprises, alors que les actes semblent avoir été validés par la chaine hiérarchique. Sans doute une manière de montrer que les hauts placés se lavent les mains en sanctionnant les sous chef·fe·s. Une meilleure connaissance de l'Inde aurait été bénéfique pour en mesurer la vraisemblance.
Néanmoins, le métrage réussit à mêler propos intersectionnel et enquête de manière judicieuse, afin de nous exposer les affres d'un système injuste, corrompu, et discriminant. L'on comprend bien que l'oppression subie par les femmes, les dalits et les musulmans sont au cœur des violences policières mais également de la violence systémique de toute une société. Les quelques scènes s'arrêtant sur des groupes d'hommes démontrent d'ailleurs très bien tout le mépris et la violence qui peut en ressortir.
Sans caricaturer, Sandhya Suri parvient à affiner ces différentes manières d'opprimer avec gradation plus qu'avec nuance. Ainsi, la mentor de Santosh, qui se pavane dans un féminisme lacunaire, se servira de sa quête de justice pour les femmes pour justifier l'agression d'un homme, presque au seul prétexte qu'il est musulman. Car il y a dans Santosh un propos fort sur l'injustice et la violence, mais qui escamote peut être un peu le fait que cette violence est également problématique avec une personne coupable des pires crimes.
Si le comportement de Santosh n'atteindra pas la brutalité haineuse de sa cheffe, elle aura elle aussi des actes problématiques, dont on comprend qu'ils sont influencés par la pression sociale, notamment corporatiste. Mais de nouveau, rien ne nous permet vraiment de comprendre avec certitude ce qui a guidé Santosh. Alors qu'il aurait été bénéfique de faire mention des raisons qui cause un tel déchainement de violence.
Cela étant, Santosh reste un film pertinent tant il démontre l'importance d'une approche intersectionnelle des oppressions, l'impossibilité d'une telle approche dans la police de ce pays, et probablement dans celle de tous les autres.
8/10