Le documentaire de Pascal-Alex Vincent sur Satoshi Kon est de facture très classique. Il est très scolaire, il établit une vue d'ensemble de l'œuvre du cinéaste japonais éclatée entre quelques mangas, quelques films et une série. Ainsi on parcourt chronologiquement "Perfect Blue", "Millennium Actress", "Tokyo Godfathers" et "Paprika" après avoir posé un contexte minimal (sous la contrainte posée par la femme du défunt qui ne souhaite pas être associée au projet, ai-je appris par ailleurs) et en établissant les grandes lignes des thématiques archi-classiques à son sujet, structurées autour de la perméabilité de la frontière entre réalité et fiction, entre passé, présent et futur. Le tout est essentiellement alimenté par des entretiens avec des personnalités assez diverses ayant échangé avec Kon : des cinéastes, des dessinateurs, des producteurs, mais aussi, spécificité de l'animation, des voix — et la voix de "Perfect Blue" Junko Iwao, notamment, est très intéressante dans ce qu'elle dit de ce métier et du rapport qu'elle a entretenue avec l'héroïne du film. Pas de quoi crier au génie, il n'y a pas grand-chose de nouveau à dire sur une filmographie aussi courte — et inachevée, puisqu'il était en train de travailler sur un projet radicalement différent a priori — mais on peut par exemple apprécier d'une part le respect d'une part de pathos négligeable, 10 ans après sa mort, et d'autre part quelques commentaires (très parcellaires certes) dissonants qui ne vont pas dans le sens de l'hagiographie unilatérale. Intéressant donc d'entendre parler Mamoru Oshii (avec qui les rapports étaient compliqués) et Mamoru Osoda, mais aussi Darren Aronofsky (la scène de la baignoire dans "Requiem for a dream » n'était donc pas du tout un plagiat mais un hommage clair) ou Marc Caro. Le portrait reste dans l'ensemble très respectueux (malgré quelques traces de comportement buté), très elliptique (au final très peu d'éléments alimentent la biographie et on ne sait pas grand-chose de ses mangas), et présente avant tout pour moi l'opportunité de se replonger dans l'imaginaire d'un auteur qui m'avait passionné il y a un peu plus d'une dizaine d'années.