Say goodnight to the bad guy
Déprimant de voir que beaucoup de gens ici n'arrive pas à séparer le film et le phénomène ghetto qu'il a généré. Peu importe. Le Scarface de De Palma est un film à l'importance incommensurable. Contre-pied total aux parrains de Coppola ou affranchis de Scorsese, il est effectivement impossible (sauf pour un rappeur) de s'identifier et d'admirer le personnage principal. Le film illustre le parcours d'un homme qui n'a jamais eu aucune possession et qui souhaite conquérir le monde trop vite, en empruntant des raccourcis qui le conduiront à sa chute. L'ascension et la chute, pas de surprise de voir le nom d'Oliver Stone au scénario. Un scénario efficace et direct, à l'image du personnage principal, qui utilise son vocabulaire limité (limité d'ailleurs au mot qui commence par F) pour développer un pamphlet contre le capitalisme et le communisme. Scarface est un monstre créé par ces deux systèmes, il vient d'un monde où il n'avait rien et arrive sur une terre où pour être quelqu'un, il faut avoir tout. Ce n'est en aucun cas un modèle moral.
Pacino crée un personnage totalement opposé au rôle de gangster élégant qu'il avait construit dans Le Parrain et se transforme en racaille cubaine hors de contrôle avec tout autant de crédibilité. C'est ce qu'on appelle un acteur.
De Palma quand à lui réalise le film le plus sobre de sa carrière. Par sobre, j'entends qu'il accepte pour une fois de mettre le fond et la forme sur un pied d'égalité, le cocktail De Palma/Stone fonctionne incroyablement bien.
Sans oublier ces décors baroques, cette violence débridée, cette musique unique de Moroder, cette époque si bien capturée... Peu de films peuvent se vanter d'occuper une aussi grande place dans la vie des gens et dans l'histoire du cinéma que Scarface. Voilà ni plus ni moins un classique, un trésor impérissable qui traversera les décennies sans jamais rien perdre de sa puissance. En gros : un putain de chef d'œuvre !