Le Scarface de 1932 par Howard Hawks reste intact dans la mémoire des cinéphiles puisque De Palma choisit pour ne pas abimer ce chef-d'oeuvre, de situer son remake actualisé dans la mafia cubaine à Miami lorsque Fidel Castro a ouvert ses prisons en jetant toute sa racaille dehors pour aller pervertir l'Amérique ennemie ; la connotation politique est donc évidente ici puisque se pose le problème de l'immigration, mais ce détail est vite évoqué pour s'intéresser à l'une des figures de gangster américain les plus mythiques et les plus fous qu'on ait vu sur un écran : Tony Montana incarné par un Al Pacino au jeu monstrueusement cabotin. Il personnifie un mafieux cubain inculte et tellement détestable dans sa vulgarité et sa grossièreté que son jeu ne détone pas avec l'outrance de certaines scènes confinant au sublime, il est constamment dans l'excès, capable de découper un mec à la tronçonneuse et de proférer des menaces lourdes, bref c'est l'un de ses rôles majeurs, pas de doute là-dessus, à tel point que les autres acteurs autour de lui ont du mal à exister tant il phagocyte le film.
C'est le film de gangsters ultime, un opéra sanglant et désespéré, bien écrit par Oliver Stone et superbement souligné par la musique de Moroder, mais quelques trucs me dérangent : la violence cataclysmique est parfois de trop, la relation entre Montana et sa soeur finit par atteindre un degré exagéré dans l'amour protecteur limite incestueux, et l'outrance totale de la scène finale où Pacino en fait des tonnes en mettant un temps fou à crever est à la limite de l'écoeurement, sans compter quelques longueurs dans la seconde partie... tout ceci m'empêche de noter plus haut ce film qui reste quand même un grand De Palma. Culte oui, mais avec des nuances.