Vive la banane
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le 8 mars 2020
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Il n’est pas interdit de penser à Edgar Allan Poe en visionnant Schlock. La ville de Canyon Valley se voit décimée par un tueur en série dont les scènes de crime ont la particularité d’être recouvertes de peaux de bananes. Les policiers, étourdis, voire puérils, n’ont pas le début d’une piste, comme l’affirme sans honte l’inspecteur Wino au reporter Joe Putzman. Ce dernier ne semble pas contrarié pour autant : il propose à ses téléspectateurs, dans la foulée, de participer à un concours consistant à découvrir combien de corps sont entassés dans des sacs, pour gagner… des plats surgelés. Tout Schlock est là : un représentant de l’ordre annonçant potentiellement « des centaines de milliers de victimes », un monstre inspiré de Double assassinat dans la rue Morgue, des contrechamps hilarants de pathétisme, une nuée de dialogues absurdes souvent savoureux…
Pour ses débuts au cinéma, John Landis s’essaie à un genre délicat : la parodie. Il embrasse 2001 : l’Odyssée de l’espace, La Belle et la Bête, le film de monstre, tout en citant à l’écran des films tels que Le Blob. Chaque élément du récit est un nouveau prétexte à l’humour et à l’absurde : une tirade policière exigeant « huit voitures et trois hommes » ; l’interview cocasse d’un scientifique ; un gorille se pavanant parmi la foule sans que personne ne s’en préoccupe ; une aveugle le confondant avec un chien et l’envoyant courir après une branche ; cette même jeune femme, une fois la vue recouvrée, recevant de son petit ami un ouvrage d’initiation à la sexualité ; un monstre terrifié par ceux du cinéma ; une voiture démembrée devant son propriétaire impuissant ; et même la bordure d’un trottoir, tellement haute qu’il en devient difficile d’ouvrir la portière de son véhicule. « Loufoque » et « calamiteux » : les propres mots de John Landis semblent en effet fidèles à ce que représente son film.
Bien entendu, l’exercice est parodique et le futur réalisateur des Blues Brothers et du Loup-garou de Londres ne se prend pas une seconde au sérieux. Ça cabotine, ça se perd en visions subjectives rudimentaires, ça brocarde avec cynisme la télévision, la police et même les spectateurs irritants des salles de cinéma… Schlock, le « chaînon manquant » de l’humanité, s’apparente à un juke-box à gags et quiproquos, sitôt humanisé, déjà défait. Et pourtant, sans avoir l’air d’y toucher, le film produit son petit effet. Les 80 minutes de péloche s’écoulent à une vitesse folle et on décroche plus de sourires béats qu’on ne voudrait l’admettre. Le Bertrand Blier de Buffet froid avait une science de l’absurde que l’on retrouve, et pas seulement sous forme lyophilisée, dans cette petite comédie méconnue. Il est peut-être temps de la réhabiliter.
Article publié sur Le Mag du Ciné
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le 29 juin 2019
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