Si Holy Flame of the martial world (ou également l'excellent Lady Assassin) brillait par son énergie débridée et un scénario prétexte à tous les délires, Secret service of the imperial court prend indéniablement en contre-pied cette démarche avec une rigueur inattendu qui fait assez penser au cinéma japonais (il y a d'ailleurs une référence assez clair à Baby Cart). Le film dégage une intensité dramatique remarquable reposant sur un script certes linéaire mais au final bien construit et d'une grande force avec pas mal de questions morales : le sens de la justice, jusqu'où doit suivre des ordres, quel est le prix d'une vie humaine et combien de vie mérite la notre.


En effet, le héros est rapidement, et injustement, condamné à mort. Refusant de rendre les armes, il va amener la mort parmi ses proches et sa famille, soit en représailles de sa fuite soit en devant les affronter directement. Ainsi, même si l'histoire peut paraître redondante, cette répétition des morts traduit toute la profondeur de cette intrigue et du sentiment de dégoût, de lassitude et d'absurdité pathétique de la situation.
Derrière la caméra, Tony Liu n'en perd pas une miette et livre une réalisation excellente et d'une maîtrise stupéfiante comparée à la folie de Holy Flame . Son découpage est d'une grande précision avec une volonté de refuser la facilité des champs-contre champs. Il y a une grande variété de cadrages qui confère une réelle noblesse à plusieurs scène comme lors de la cérémonie funéraire qui ne reproduit jamais deux fois le plan pour un admirable sens de l'espace.
Le montage n'est pas en reste et des idées simples décuplent l'émotion de certaines séquences. Par exemple lors de la charge du beau-père contre le héros, Tony Liu intègre quelques flash-backs fugaces où son petit-fils court vers lui. Trois-quatre plans qui confèrent au combat une dimension tragique où les personnages sont prisonniers d'un pouvoir tentaculaire et sadique et doivent se battre contre leurs convictions personnelles et contre leur volontés.


Ce qui est dommage à ce niveau là, c'est d'avoir recourt aux accélérés pour les combats. Sans être démentiels, ils sont d'un très bon niveau mais cette rapidité artificielle dessert l'atmosphère du film. Quand ils reviennent à une vitesse plus raisonnable vers la fin, on retrouve une puissance des coups qui semblent plus désespérés, fatalistes ou plus rageurs. Le final à ce titre dégage un sentiment de puissance impressionnant mais on pourrait évoquer aussi l'affrontement beau-père/fils ou le sacrifice du frère.
Le passage un brin clip avec la chanson couvrant un gigantesque massacre lors de la fuite éperdue du héros et de son épouse fonctionne curieusement très bien et aide à faire passer la démesure du combat.


Enfin, ultime bon point : une interprétation sans faille venant d'acteurs totalement habités par leur rôles et parfaitement crédible dans l'émotion.


Un référence absolu du genre que je n'attendais pas dans ce registre si pessimiste, tout en étant divertissant et rythmé idéalement. L'un des derniers chefs d'œuvre de la Shaw Brothers

anthonyplu
8
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le 24 juin 2017

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