Ava Duvernay a donné beaucoup d’impact à Selma car elle n’en a pas fait un biopic sur Martin Luther King. Cette simple vérité est vraiment essentielle.Une scène du film comme cette dame se voyant refuser une énième fois son inscription sur la liste électorale de sa ville ou celles de la répression policière inappropriée rappellent que des millions d’anonymes de couleur noire ont connu l’injustice il n’y a pas soixante ans.Et qu’un pasteur engagé les a aidés à reconquérir leurs droits bafoués. L’impact de la première marche non-violente est bien sûr ce qui va motiver l’inévitable séisme au plus haut sommet de l’administration amèricaine. La relation entre Lyndon Johnson et Martin Luther King de prime abord révérante (le pasteur ayant obtenu le prix Nobel de la paix et devenant un interlocuteur à qui prêter une écoute plus attentive) allait devoir aboutir sur du concret pour la communauté noire des États du sud de l’Amérique.Rentrer dans cet envers du décor des droits civiques, constater que King et sa garde rapprochée étaient surveillés de près par le FBI et réaliser que des procès à priori délicats ont ouverts des portes sont des moments réussis car pas assez abordés de cette manière pour les non-initiés de l’histoire américaine contemporaine.Selma fait mouche, a une transcription chronologique maîtrisée des faits et tente de donner des points de vue de l’époque ( des hommes ou femmes de la rue jusqu’au gouverneur de l’Alabama). Le sujet étant sérieux et historique, Ava Duvernay a forcément dû respecter un habillage conventionnel pour ne pas tomber dans la caricature.C’est le petit bémol du film ne gâchant en rien sa force d’évocation.Selma reste à voir, à être apprécié à sa juste valeur et à retirer qu’une lutte bien conduite et construite n’est jamais veine.